" Un film muet ? Mais dis donc, on risque pas de s'emmerder alors ? " Et bin non, on risque pas !
Nous sommes à Hollywood en 1927. George Valentin est l'acteur muet le plus aimé du monde. Mais l'arrivée du cinéma parlant va tuer sa carrière pendant que le crac boursier va ruiner son compte en banque. Alors que George s'engouffre dans les abysses, Peppy Miller, nouvelle tête et star du cinéma parlant va commencer son ascension. Une histoire comme Hollywood les aime en somme…et réalisée par un français : Michel Hazanavicius !
Au départ il y a ce projet qui peut sembler fou : réaliser un grand film muet en noir et blanc ! À une époque où le son n'a jamais été si pur, où les images n'ont jamais été si colorées et où l'information narrative passe autant par le dialogue que par l'image (et plus encore , ne voit-on pas souvent un personnage résumer par la parole ce qu'il s'est passé il y a une scène à peine ? ), Michel Hazanavicius ose se lancer dans une aventure casse-gueule !
Mais l'homme a du talent et une connaissance certaine du média cinématographique : même en faisant l'impasse sur ses nombreux détournements ( que cela soit le court " Derrick contre Superman " ou le long " La classe américaine" ) il y a les deux films " OSS 117 " qui parlent pour lui. À chaque fois, Hazanavicius a tourné ses films en tentant de s'approcher au maximum des effets et des rendus de l'époque où son intrigue se déroulait ! Il y a là une connaissance tant historique que technique de la chose cinématographique ! Sa démarche de rendre un film muet se déroulant à l'époque du muet est donc cohérente dans sa filmo ! Encore fallait-il trouver les acteurs capables de porter un tel projet et surtout une histoire que le spectateur moderne ne trouverait pas désuète. L'histoire j'en ai parlé plus haut , parlons donc des acteurs.
Alors qu'il est sur notre écran de spectateur, George Valentin ne projette plus qu'une ombre de lui-même : la métaphore de la déchéance est si forte et si subtile que personne ne peut se tromper ! Des images si bien pensées, le film en est rempli.Une manière de nous rappeler que le cinéma fut à la base un art purement visuel !
À part Jean Dujardin et Bérénice Béjo ( le couple de " OSS 117" : Le Caire, nid d'espions"), Hazanavicius est allé cherché des gueules hollywoodiennes (encore une fois, démarche logique) et pas des inconnus non non ! John Goodman jouant un producteur comme on se les imagine, James Cromwell en chauffeur fidèle envers son boss, Penelope Ann Miller en femme délaissée (alors qu'elle-même est une actrice délaissée par Hollywood depuis des années et on se demande encore pourquoi !). Et puis bien sûr nous avons Béjo qui n'a jamais été filmée de la sorte, Hazanavicius la filmant dans toute sa grâce et splendeur ( il l'a épousée peu après " Le caire,…", cela explique sans aucun doute pourquoi il la magnifie, plus que tout autre il connait les angles qui la feront ressortir!) et Dujardin, qui a capté l'essence du personnage et de l'époque muette.
Tous jouent comme il faut, en surjouant juste ce qu'il faut pour bien faire passer l'information mais Dujardin a réussi une chose en plus, une chose impalpable sur laquelle on ne sait pas mettre de mot mais qui lui offrit, et cela est mérité, un prix d'interprétation à Cannes en mai 2011. On touche moins ici le génie d'un acteur que sa magie…la magie du cinéma. Et cette magie, Hazanavicius l'a mise en scène avec un soin particulier et a su la capter avec talent. Certains plans tout simples font passer des informations et ce même si il utilise des mouvements de caméra impossible pour l'époque, il utilise aussi l'art tout bête de la symétrie d'une image qui diffuse une info ,oserai-je dire, asymétrique ( la scène du restaurant est un exemple frappant,prêtez-y attention lors de la projection du film !).
Au final, le titre du film est un mensonge ! The artist ? Non, ils étaient plusieurs !
C'est culotté mais ça vaut le coup de voir le résultat.
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