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dimanche 15 décembre 2013

King of the bad jokes.

Aujourd'hui, prenons un peu d'avance voulez-vous. Le 14 Février prochain, Urban Comics sortira le 3me tome de Batman scénarisé par Scott Snyder.

Ce tome sera centré sur le retour du Joker.

Cependant, le mensuel Batman Saga a publié, au rythme d'un chapitre par mois, ce fameux retour intitulé Le deuil de la famille ( Death of the family en V.O, ce qui n'est pas exactement la même chose*).
Lorsque le volume cartonné sortira, je mettrai cet article à jour si besoin est.

Il y a un an, le Joker s'évadait de l'asile d'Arkham ( oui, encore une fois ) avec l'aide d'un nouveau maniaque : le Taxidermiste. Pour une raison aussi obscure que malsaine, le Joker avait demandé à son complice de lui …couper le visage. Ce dernier a alors été confisqué par le GCPD (Gotham City Police Department ) et placé dans une chambre froide. Nul ne sait, pas même Batman, le plus grand détective du monde, où est allé le Joker et ce qu'il a fait durant ce laps de temps.
Ce soir, le propriétaire de ce morceau de peau décolorée vient reprendre ce qui est à lui.
Ce soir, le sang va couler.
Ce soir, le Joker est de retour…

Pour bien comprendre ma démarche pour rédiger cette critique, je vais devoir un peu vous parler de moi et beaucoup du mensuel Batman Saga. Tout comme lors de La nuit des Hiboux, les bat-séries sont entrées en crossover. Ici, l'ennemi multiple mais au visage de hibou a laissé place à une menace solitaire au visage balafré. Et ça a été une véritable overdose de gore, d'intrigues glauques et malsaines. Pris séparément, je pense que la lecture de chaque série aurait été possible sans haut-le-cœur. Mais à la suite, c'était presque insoutenable et je ne suis pas une petite nature.

J'ai donc décidé, avant d'écrire cette chronique, de relire l'arc narratif propre à la série Batman. Point.
Et force est de constater que ça passe déjà bien mieux, même lu d'une traite. Pendant 4 épisodes (sur 5 ) , Scott Snyder écrit une saga remplie de tension et de paranoïa : le Joker aurait découvert l'identité de chaque membre de " la famille" ( à savoir Batman/Bruce Wayne, Robin/Damian Wayne, Nightwing/Dick Grayson, Red Robin/ Tim Drake, Red Hood/Jason Todd et Batgirl/Barbara Gordon).
Et Bruce semble pourtant se comporter en connard prétentieux, trop sûr de lui et du fait que non, le Joker n'a rien pu découvrir, malgré sa théâtralité à démonter le contraire en agitant sous le nez de nos héros un mystérieux petit carnet en cuir de chauve-souris.

Scott Snyder sait sur quoi il écrit, et sait qu'il ne doit pas se planter en faisant revenir l'adversaire le plus emblématique de la chauve-souris gothamite. Le Joker est une sorte de personnage qui adapte sa personnalité à ses besoins de taré, c'est pour ça que même les pires frappés de Gotham le craignent : si on le croise, on ne sait jamais s'il va vous buter ou vous raconter une blague pourrie.Il évolue en permanence et les auteurs avant Snyder ont donc joué avec lui et changé son comportement en de nombreuses occasions. Snyder va aller plus loin, il va livrer le Joker ultime ! Il va amplifier ce personnage dérangeant ( et dérangé),c'est un individu hors-norme dont l'existence est dirigée vers le contraire des attentes sociétales de base : il est dérangeant par nature.






Cette incarnation du Joker est autant le Joker amoureux (de batounet) de The dark Knight Returns ( Frank Miller), que les Joker de Burton et  Nolan (au rayon cinéma), celui de Alan Moore ( The Killing Joke ) ou de Grant Morrison. Alors oui, Snyder a lu Batman, il a compris ce qu'était le Joker mais sa démarche, de ne pas le faire évoluer, peut sembler étrange...
Il va également émailler son récit de références plus ou moins explicites à d'autres "grands moments" de la vie du Joker en évoquant ses origines ( celles présentées dans The Killing Joke ) ou la prise d'otages à Arkham.



Jusqu'au bout, ce cinglé va jouer avec la Police et la Bat-Family, allant jusque les humilier. Embrigadant d'autres figures emblématiques pour jouer un rôle dans son plan de psychopathe. Et puis, soudain, lors des deux dernières pages du chapitre 5, tout s'éclaire, la démarche de Snyder apparaît : il s'agissait de raconter une très mauvaise blague du Joker.
Et pour raconter cela, le Joker n'avait d'autre choix que de s'adapter d'une manière inédite : en piochant dans tous ses aspects ! Le comportement hautain et trop sur de lui affiché par Bruce est expliqué. Scott Snyder avait prévu le coup.
Mais le coût payé par la bat-family est élevé et la fin, douce amère, indique peut-être que les blessures (physiques et surtout mentales ) prendront du temps à cicatriser. Le Joker est allé trop loin, peut-être Batman a-t-il une responsabilité morale dans le fait de laisser ce fou furieux en vie.
Quoiqu'il en soit, cet arc, qui démarrait et continuait sur une lancée trash et morbide, se termine plus subtilement en expliquant ( encore faut-il y réfléchir) pourquoi il nous a été livré comme cela. Une lecture qui peut s'avérer éprouvante par ses aspects morbides mais qui , finalement, nous démontre que Snyder réfléchit beaucoup à comment écrire ses histoires.

Les dessins de Greg Capullo rendent parfaitement cette atmosphère lourde et malsaine. En ajoutant des détails dans les décors, les costumes et le look du Joker nouveau, qui porte son visage comme un masque. Capullo fait un excellent travail sur Batman et il est allé chercher ici ce qui le rendait si bon sur la série Spawn : l'habilité à créer des images superbes tout en travaillant leur rendu dégueulasse.
Accrochez vous donc en le lisant, mais ne doutez pas qu'il y a un travail de réflexion de la part de l'auteur derrière tout ça.

*Un arc narratif antérieur, intitulé A death in the family avait été traduit par Un deuil dans la famille. Cet arc voyant le Joker assassiner Jason Todd, le second Robin ( qui, depuis, a été ramené à la vie par Talia Al Ghul en le plongeant dans un puits de Lazare). Le retour du Joker, sous son titre américain, était donc une référence claire au titre de la mort de Jason. La traduction dudit titre en français devait donc refléter cette parenté.

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