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mardi 12 février 2013

Une histoire à 5 $ !


Véritable arlésienne du cinéma, Lincoln débarque enfin sur nos écrans. 
Projet nourri par Steven Spielberg depuis 20 ans ( l’idée a commencé à la chatouiller pendant le tournage de La Liste de Schindler, d’ailleurs, Liam Neeson devait interpréter le président quand le projet était encore jeune ) , le film est-il à la hauteur des attentes ?

Lincoln et la fin de l’esclavagisme. Un sujet en or pour Spielberg car sujet profondément humain. L’égalité humaine que l’on soit noir, blanc, juifs, etc…est un concept que l’on retrouve souvent chez Spielberg. L’exemple le plus parlant et le plus connu est bien entendu La liste de Schindler ( l’histoire folle d’un partisan nazi qui sauvera des milliers de Juifs parce que pour lui il s’agissait de sauver des hommes, des femmes , des enfants. ) mais se retrouve aussi là où on ne l’attend pas ( pensez à Jurassic Park où tout le monde est égal face à un raptor affamé, A.I où la population humaine n’existe plus à la fin du film, Il faut sauver le soldat Ryan où , que l’on soit américain, allemand ,français, l’on est tout confronté à l’absurdité du concept même de la guerre ). C’est ce concept que Spielberg défend dans son film et non la réalité historique : si la légende est plus belle que la vérité, imprimez la légende ! En évitant d'en faire un chasseur de vampires quand même, il y a des limites à ne pas franchir.

Et c’est ce que Steven Spielberg va faire ! L’histoire du film ne retrace pas toute la vie de Lincoln mais uniquement les derniers mois de sa vie. Comment il va mettre fin à la Guerre de sécession et à l’esclavagisme dans le même temps. C’est avant tout une bataille politique et le film tourne beaucoup autour de cela (de la guerre, Spielberg ne montrera quasiment rien. Nous aurons juste les échos qu’en ont les personnages à Washington ).

Durant 2H30 passionnantes, Spielberg va nous conter les magouilles, les coups tordus, les appels au sentiment de noblesse qui seront nécessaire pour obtenir les voix manquantes pour faire entrer un 13me amendement à la constitution des USA.C’est le cœur du film et le cheval de guerre du Lincoln qui nous est présenté ici. Et en parallèle, la vie privée de celui-ci.



Ce qui frappe, c’est souvent cette image d’homme seul. Immobile ou en mouvement, Spielberg film Daniel Day Lewis, épatant de justesse, comme une silhouette perdue. Ses rapports avec sa femme et ses fils sont tantôt tendus tantôt bienveillants ( comme dans chaque famille sans doute). Et le casting aide beaucoup : Sally Field, enfin dans un rôle qui ne soit pas exaspérant ( j’avoue, je n’y croyais plus depuis le temps ), Joseph Gordon-Levitt (petit chouchou de Chris Nolan depuis Inception), toujours impeccable ,Tommy Lee Jones dans ce qu’il fait de mieux c'est-à-dire les emmerdeurs bougons mais avec un bon fond, etc…Notons aussi la présence de James Spader en chef d’une équipe de filous prêts à tout pour obtenir les voix dont Lincoln a besoin. Leurs séquences sont souvent teintées d’un brin de comédie, bouffée d’oxygène un brin cynique qui permet au spectateur de reprendre son souffle dans ce marasme morose qu’est la politique.

La réalisation est très académique, certes. Mais le sujet ne se prête nullement aux grands mouvements de caméra complexes. À la place Steven Spielberg porte un soin tout particulier à la composition de ses plans, aidé en cela par son directeur photo et la reconstitution minutieuse des costumes et des décors. Les images ont du sens et sont cadrées pour en donner ! Tellement que l’artifice habituel utilisé pour investir le spectateur émotionnellement n’existe presque pas dans le film : la musique ! Et puis, à 80 ans, on peut bien donner un peu de repos à ce brave John Williams, non ? 
John Ford peut être fier, Spielby a bien retenu ce que le borgne lui a appris lors d'une entrevue brève mais intense entre lui-même et ce jeunot qui voulait devenir réalisateur !



On pourra tergiverser à loisirs sur les inexactitudes historiques. Mais depuis longtemps mon opinion est faite : le cinéma de fiction n’a pas vocation documentaire. Au plus proche que l’on soit de la vérité, un film n’en reste pas moins un reflet plus ou moins déformé selon l’envie du réalisateur ( Inglorious Basterds en est un bon exemple ). Alors peut importe que le Lincoln de Spielberg soit si préoccupés par le sort des noirs qu’il en devient une image d’Epinal , le sujet n’était pas là !

Néanmoins, sans doute à cause de son manque d’ampleur  liée à l’évocation d’un épisode  de la vie et non de la vie elle-même de Lincoln et surtout du trop peu de zones grises explorées ( le point de vue des Sudistes est à peine évoqué ), Lincoln reste un Spielberg mineur ( ce qui le place déjà bien au dessus de la plupart des films actuels) mais  fascinant et tellement bourrés de qualités qu'il ne peut qu'emporter l'adhésion et , qui sait, remporter quelques Oscars bien mérités! 


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