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mardi 20 avril 2010

Nés sous X

Au début des années 2000, Joe Quesada, dessinateur et scénariste et qui était l’un des éditeurs en chef de la collection Marvel Knights (collection qui devait relancer des séries moribondes, comme Daredevil par exemple et qui depuis est un hit) se voit bombarder rédacteur en chef de toute la maison Marvel. Un artiste ayant subi le système allait enfin accéder aux commandes et tenter de redorer le blason de bien des séries produites par la « maison des idées ». Il avait une ligne directrice claire et précise : ramener les lecteurs vers Marvel. Il avait conscience que les dessins étaient la grande force de Marvel face à DC Comics leur concurrent direct. Marvel avait besoin de scénaristes brillants! C’est pourquoi il opéra une opération séduction sur des grands noms associés à d’autres éditeurs. On hérita par exemple de Joe Michael Straczynski (ou JMS,ce qui est plus simple,qui avait fait ses armes à la télévision et chez Top Cow comics) sur Spider-Man qui fut revivifié durant 6 belles années. Et Grant Morrison ,qui officiait surtout chez DC et Vertigo atterrit sur X-men, rebaptisé New X-Men pour l’occasion. C’était la grande époque où Quesada tentait de ne pas surexposer un personnage en limitant ses apparitions dans d’autres séries et où les gros cross-overs n’apparaissaient pas tous les 6 mois. Certes la situation n’a pas duré jusque maintenant mais au début, les changements chez Marvel étaient bien perceptibles.

Grant Morrison est un auteur alambiqué. Il suffit de jeter un œil à son œuvre culte « Les invisibles » pour s’en rendre compte : des références culturelles à la pelle (mais pas uniquement occidentales les références),des flash-backs à foison dont l’utilité ne saute aux yeux que très tardivement et l’introduction d’un détail anodin dans une image ou une conversation et qu’il ne développera que des mois plus tard,le rendant du coup bien moins anodin. Cette recette, Grant Morrison l’appliquera sur les mutants chéris de Marvel tout en ayant l’intelligence de revoir deux ou trois éléments pour renouer avec le succès. À l’époque de son arrivé,le 1er film X-men a eu un joli succès . Les gens associent Hugh Jackman à Wolverine et Morrison l’a bien compris. Son Wolverine sera omniprésent ,chacune de ses apparitions sera marquante, dans le registre de l’action comme celui du soap. Morrison vire aussi les costumes colorés pour coller plus près au look uniforme véhiculé par le film de Bryan Singer.


L'équipe,sous le crayon d'Ethan Van Sciver.


Les arrangements finalisés, il est temps pour lui de se lancer dans l’écriture de l’histoire. Ce qui dans son esprit se traduit par une lente et minutieuse déconstruction de tout ce qui a été fait avant lui. Tout en respectant à la lettre le cahier des charges mutantes : du soap opéra,des extra-terrestres,la haine raciale envers les mutants,etc…dit comme ça on jurerait qu’il n’y a rien de nouveau sous le soleil de l’école Xavier pour surdoués. Et pourtant il y a quelque chose de pourri au royaume des X-Men : meurtre, adultère, drogue, rébellion estudiantine ,tout cela n’est qu’un aperçu de ce qu’ils devront affronter sous l’égide du scénariste de Glasgow.

Emma Frost,sous le crayon d'Ethan Van Sciver.


Pour marquer les esprits,rien de mieux qu’un meurtre. Morrison opte lui pour le génocide.L’île de Génosha (une sorte d’Israël mais pour mutant. Et ma référence à Israël n’est pas fortuite puisque le chef de cet état se trouve être Erik ‘’Magneto ‘’ Lensher, juif rescapé des camps) est attaquée par une Sentinelle tueuse de mutant géante. 16 millions de victimes en un éclair. Au même moment,Henry "Hank" McKoy,dit le Fauve, découvre un gêne dans l’ADN humain qui prévoit la destruction de l’humanité pour faire place à la nouvelle espèce dominante :l’Homo Superior (les mutants). La destruction de Génosha est-elle une tentative des humains pour ne pas perdre leur place dans la chaîne alimentaire ? La vérité est bien pire et terrifiante que cela.


Une version de l'équipe par Marc Silvestri.

Morrison commence donc très fort, sans temps morts. Tous ses arcs ne seront pas aussi efficaces que celui-ci mais aucun ne sera mauvais. Et en abordant la question de la transsexualité par le prisme déformant de la question mutante,Morrison va plus loin encore que lorsque les auteurs le précédents avaient comparé (mais sans le dire tout haut) les mutants à la communauté gay.
Il introduit donc un scientifique psychopathe qui se cache derrière un vernis de respectabilité,John Sublime qui prône que n’importe qui a le droit d’être un mutant. Et cela se traduit par le rapt et la dissection de mutants pour que des humains ordinaires se fassent greffer des organes mutants, devenant ainsi des U-Men. Morrison place minutieusement ses pions et ses autres pièces. Mais cette partie d’échec se joue dans le noir,le tableau de jeu n’apparaissant qu’en filigrane durant son run sur le titre et ne sera révélé qu'à la toute fin de son passage sur les X-Men. Ce qui inclut pour le lecteur soit de relire toute la série d’une traite pour retrouver toutes les allusions (qui étaient bien sous notre nez) soit d’être très vigilant durant des années et de tout retenir. J’ai beau avoir une bonne mémoire, j’ai relu tout le run de l’ami Grant pour écrire cet article. Et force est de constater que j’ai bien mieux appréhendé son passage comme un tout soudé avec cette relecture. Il a tout simplement détruit les symboles du X marvéliens ,laissant ses successeurs dans une panade noire dont peu sauront tiré profit (Whedon y est arrivé).

Fantomex,sous le crayon d'Igor Kordey.

Côté graphique par contre,il y a à boire et à manger.Un nombre important de dessinateurs se succéderont pour illustrer les écrits de Morrison. Si le premier du lot,Frank Quitely, assure comme une bête il est aussi très lent dans sa production ce qui multipliera les dessinateurs remplaçant. Si Igor Kordey est vite désigné comme l’un des remplaçant principaux,force est de constater que le monsieur n’est pas super à l’aise quand il s’agit de dessiner 22 pages par mois ,passant du regardable au franchement mauvais. Seuls Ethan Van Sciver, Phil Jimenez (qui avait bossé avec Morrison sur Les Invisibles)et Marc Silvestri tirent leur épingle du jeu dans cette valse des dessinateurs. Même l’excellent Chris Bachalo n’arrive pas à son top sur le titre. Dommage,l’absence de cohésion graphique (et de talents chez certains dessinateurs) est vraiment LE point noir de la série que Morrsion porta durant près de 40 numéros (soit presque 3 ans,de 2001 à 2004) et dont certaines actions se font encore sentir de nos jours. Morrison n’a pas pour autant posé une pierre angulaire à l’édifice mutant mais il a fourni un terreau fertile pour tout ceux qui sauront l’exploiter correctement. Que cela soit en marchant sur ses traces ou en tentant de les effacer.


Wolverine et Jean Grey (Phenix) par Phil Jimenez.

samedi 17 avril 2010

Classé X

Je ne vais pas y aller par quatre chemins : j’adore Joss Whedon. D’ailleurs au fil des pages de ce blog je pense que ça s’est un peu vu,non ?

L’homme est cultivé autant dans les classiques que dans ce que beaucoup qualifie de culture populaire.Malheureusement son talent sera reconnu par beaucoup après sa mort :pour l’intelligentsia,aimer la culture populaire ne peut qu’annihiler toutes autres qualités.

Et voir une telle personne,capable de balancer une référence à une grande œuvre littéraire reconnue ou à un film culte sans être lourd devenir scénariste sur les X-men est un vrai cadeau.
Et comme en plus il est assisté de John Cassaday aux dessins,qui érige la destruction massive comme un des beaux arts tout en posant des scènes plus calmes sans rien perdre de sa superbe visuelle,on ne peut qu'être enthousiaste à la lecture.


Respectant l’univers dans lequel il doit évoluer,Whedon n’en oublie pas pour autant de faire son truc : faire vivre des aventures disparates à ses héros et révéler en milieu de parcours qu’il y avait un fil rouge,bien perceptible pourtant mais qui ne semble évident qu’une fois révélé, et surtout terminer son histoire en beauté en mêlant action,danger,suspense,joie et tristesse.
Car chez Whedon les groupes perdent souvent des membres quand le moment de sauver le monde est arrivé (même Buffy a passé l'arme à gauche en fin de 5éme saison,c'est dire si personne n'est à l'abri d'être envoyé ad patres par le Monsieur).




« Astonishing X-Men « commence alors que Kitty Pride revient à l’institut Xavier,non pas comme élève mais comme enseignante,c’est que la petite Shadowcat a grandi. Charles Xavier n’est plus en charge,c’est Cyclope qui mène la danse,le leader historique des X-men s’apprête à former une nouvelle génération de mutants dans un climat d’hostilité (mais ça ne change pas depuis le début des X-Men ça) et de remise en question. En effet,une scientifique vient de faire une découverte fracassante : un vaccin contre la mutation. Comment une telle chose a-t-elle bien pu se produire ? C’est ce que les X-men vont tenter de découvrir allant de révélations en surprises colossales. Mais tout cela n’est que le début d’une épopée qui les verra se frotter à des aliens peu engageants,des machines conscientes et autres joyeusetés qui ne manquent jamais de venir égayer leurs journées.





Notre entrée dans cette histoire se fait par les yeux de Kitty,rien d’étonnant de la part de Whedon qui a toujours affectionné les femmes fortes (Buffy,Faith,Echo,etc…) et qui est donc bien rôdé ,ça aurait été bête de sa part de ne pas utiliser cette force acquise au fil des années. Tout n’est pourtant pas parfait (du moins dans les deux premiers arcs de la série) car malgré un passage par la case comics des années auparavant, Whedon ne maitrise pas encore le découpage comme il le faudrait, ce qui inclus soit une baisse de régime par moment soit une rapidité déconcertante dans l’avancement des situations. Mais le tout restait prenant de bout en bout grâces à des situations jouissives pour les amateurs de super-héros,un humour fin et parfois référentiel et surtout une sacrée science des dialogues . Whedon posait ses pièces sur l’échiquier avant la deuxième partie de son run. Une seconde partie bien mieux maitrisée et qui nous dévoile ce que Whedon avait placé de ci de là dans le premier morceau de son histoire. Tout s’emboîte jusqu'au dénouement final déchirant et poignant auquel l’auteur a convié presque tous les super-héros du Marvelverse.



Avec les X-men, Whedon s’est posé comme l’anti-Grant Morrison,tout en respectant le travail de ce dernier car Whedon base une bonne part de son intrigue sur des évènements sortis de l'esprit fertile de l'ami Grant.
Morrison avait supprimé les costumes pour arriver à des uniformes proches de ceux vus dans les films réalisés par Bryan Singer, Whedon revient aux costards bariolés, rappelant que ce sont des super-héros et que leurs costumes doivent servir à les identifier. Morrison bâtissait une intrigue complexe qui nécessitait de tout relire depuis le début pour voir de quoi il retournait ? Whedon bâtit une intrigue complexe qui ne nécessite pas de tout se retaper car il n’a pas cherché à cacher ses plans,juste à bien les dissimuler le temps que ça fasse chboum dans nos têtes de lecteurs. Mais attention,ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit : le passage de Grant Morrison était lui aussi un grand moment de lecture puisqu’il m’a réconcilié(avec Mark Millar et ses Ultimate X-men) avec les mutants. Mais il n’est pas nécessaire de faire alambiqué à mort pour pondre un blockbuster intelligent et distrayant à la fois : Astonishing X-Men en est la preuve.

vendredi 9 avril 2010

"Bon sang ce que j'aime être une tortue!"

Enfant des années 80, j’ai grandi avec les tortues ninja.
Pour ceux qui ne connaissent pas voici un rapide résumé : Hamato Yoshi, grand maître des arts martiaux est assassiné par son rival, Oroku Saki. Le rat de compagnie de Yoshi,Splinter, survit dans les égouts et croise le chemin de 4 bébés tortues baignant dans un liquide étrange. Au contact de cette substance, les 5 animaux entament une mutation en êtres anthropomorphes. Splinter formera les tortues devenues adolescentes à l’art du ninjitsu que son maître humain pratiquait et donnera à ses « enfants » les nom de divers artistes de la renaissance : Léonardo,Raphaël,Donatello et Michelangelo. Outre leur formidable habilité aux arts de combat,les tortues sont folles d’un met de choix : les pizzas ! Inconnus des humains,exception faite de leurs amis April et Casey,les tortues tentent de rester dans l’anonymat dans leur lutte contre le clan des Foot.

Au départ cet univers de fiction était un pastiche des oeuvres de Frank Miller en général et de son Daredevil en particulier. En effet,le produit dans lequel pataugeaient les tortues s'est retrouvé dans les égouts après qu'un ado ait sauvé un aveugle d'une collision avec un camion rempli de déchets toxiques.Un miracle que Marvel n'ait jamais porté plainte.
C’est donc avec nostalgie que je me suis replongé dans leur univers avec ce film d’animation en 3D sorti en 2007 déjà. Et si le succès au box-office n’a pas été au rendez-vous (la turtle mania est morte il y a de nombreuses années),le film ne démérite pas.

L’histoire se situe quelques temps après leur victoire sur Shredder,leader du clan des Foot (et connu également sous le nom d’Oroku Saki !). Léonardo a quitté le nid ,voyageant clandestinement autour du globe et cherchant sa voie. Si Splinter,dont la voix est celle de l’acteur japonais Mako,qui signe ici son dernier rôle avant son décès, a bien accepté la décision de son fils,il n’en est pas de même pour Raphaël qui passe ses nuits à arpenter les rues de New-York sous une armure dissimulant sa vraie nature et combattant le crime comme il peut pendant que Donatello fait marcher son cerveau génial et que Michelangelo fait fonctionner un estomac gargantuesque. April (Sarah Michelle Gellar) est devenue chercheuse de trésor et sa dernière mission consistait à retrouver 4 statues pour un riche et mystérieux industriel : Max Winters (Patrick Stewart,excusez du peu) dont les desseins semblent belliqueux, ce dernier s’est en effet octroyé les services du clan des Foot reformé et à la tête duquel se trouve la belle mais redoutable Karaï (Zhang Ziyi)pour la protection de son immeuble et pour être ses yeux et ses oreilles invisibles dans les rues new-yorkaises.









Visuellement c’est du tout bon. L’animation est fluide,les séquences bien construites et le montage est au diapason. Les images n’ont rien à envier aux productions Pixar ou Dreamworks bien que les tortues évoluent dans un environnement bien plus sombre que celui des films des studios précités. Le design des tortues ne choque pas et rappellera de bons souvenirs à tous les jeunes enfants qui vivent encore dans vos cœurs de jeunes adultes (je garantis moins l’effet sur les autres pour l’aspect nostalgique). L’intrigue,mettant l’ennemi habituel un peu en retrait permet un rafraichissement de la franchise en plaçant les tortues face à une menace plus surnaturelle qu’usuellement tout en laissant la porte ouverte pour une suite (qui apparemment ne viendra pas,ce qui est bien triste) où la menace de Shredder aurait bien pu planer.Les personnages existent,une vraie dynamique anime les uns et les autres,le film offrant en cela des personnages fouillés (surtout Léo et Raph,les frères les plus proches et les plus différents à la fois).

Le tout est un peu court,80 minutes,mais remplit son contrat de faire renaître avec panache les 4 frangins verts. Ajoutez à cela l’une des meilleures composition musicales de Klaus Badelt (ancien protégé de Hans Zimmer) qui multiplie les influences (classique,zimmerienne of course,jazzy) et vous obtenez le meilleur film de la saga. Alors ne vous enfermez pas dans votre carapace et laissez-vous tenter par une soirée pizza en compagnie des tortues les plus fun du monde. Cowabunga!







mercredi 7 avril 2010

Le cliché des Titans.

Passons sur le titre mensonger qui collerait bien mieux à un film sur la boxe et attaquons tout de suite avec le cœur du sujet : la mythologie grecque qui, par la grandeur de son terrain de jeu et la petitesse de la caractérisation psychologique des personnages, est idéale pour être adaptée par Hollywood. Seulement même quand le travail est mâché il y en a encore qui foireront le boulot. Pourtant le pitch original (pas celui du remake, celui du mythe) est des plus simples ,des plus classiques… Persée, héros (donc demi-dieu) fils de Zeus et de Danaé, est envoyé décapiter la Méduse. En chemin avec la tête de la créature en trophée, il domptera Pégasse et sauvera la princesse Andromède qui devait servir de sacrifice à un monstre marin. Simple et concis, il suffisait juste de rajouter un peu (mais pas trop )de finesse psychologique et de décider comment filmer les scènes d’action. Mais voila, face à l’hypogonadisme des producteurs et leur envie de simplification à outrance, certaines grandes lignes disparaissent ou sont modifiées…pour rien !

Le Mythe dans un mixeur…et on verra bien dans quel état ça ressort.

Mes cours de latin-grecs sont loins ,aussi tous les changements ne m’ont-ils pas sauté aux yeux mais ça frise le n’importe-quoi. Commençons par le début déjà : Persée est le fils de Danaé,fille du roi d’Argos, Acrisios. Un oracle avait prédit au roi que son petit fils le tuerait,aussi ce dernier enferma-t-il sa fille. Mais Zeus trouvant toujours un moyen pour tirer son coup (de foudre évidemment !) avec les jolies filles de bonnes familles, mit enceinte Danaé. Le roi jeta donc sa fille et son petit fils à la mer, enfermés dans un sarcophage. Le film balance certes la pauvre fille à l’eau avec son bébé mais : 1° elle est la reine et non plus la fille, 2° aucune prédiction, le roi jette sa femme (abusée par le dieu qui avait pris la forme de son mari, donc elle n’est même pas fautive) par pure vengeance, 3° bin il est le roi de rien du tout puisque Argos est une cité gouvernée par le père d’Andromède dans le long-métrage (allez donc expliquer à des américains qu'il était roi d'Ethiopie en fait) et 4° Zeus se fait la pauvre femme en représailles car Acrisios avait lancé un assaut contre l’Olympe et ses divins habitants !
Et ça ce n’est que pour les origines.Le massacre continue jusqu'au générique de fin (générique d'un kitsh total et grotesque),le tout sur une musique torchée en 3 semaines puisque Craig Armstrong a été remercié de son travail par la prod pour être remplacé par cet étron de Ramin Djawadi dont on ignore encore comment il a fait pour entrer (par effraction sans doute) dans l'écurie Remote Control,la société d'Hans Zimmer. Ramin avait déjà salopé le travail sur Iron Man (et son éviction du second opus au profit de John Debney est un grand bien pour les oreilles exigeantes!).



Si faire se rencontrer Andromède et Persée dés le début n’est pas bête (là au moins on comprend pourquoi il la sauve),le reste est un désastre scénaristique d’adaptation : Io,ancienne compagne de sauterie de Zeus dans la mythologie est devenue ici une victime des dieux qui lui ont donné la jeunesse éternelle (ah oui trop dégueu comme châtiment ça) et qui a veillé sur Persée depuis sa naissance (Obi-Wan es-tu là ?),Pégasse est juste l’étalon du troupeau de chevaux ailés (alors qu’il jaillit du sang de Méduse si on veut être proche de la mythologie comme le fanfaronnait pourtant tellement Louis Letterier)….j’en passe et des meilleurs. Même la chronologie est de travers lors du fameux combats contre les scorpions qui devraient être issus eux aussi du sang de Méduse ! Et à la fin il ne se marie même pas avec la princesse (qui pourtant est bien jolie et d’origine grecque, contrairement au reste du casting, Alexa Davalos), car si le film marche au box-office il deviendra le premier volet d’une trilogie et on apprendra sans doute qu’Andromède est sa sœur…suivez mon regard !

Reste que chercher les ajouts,emprunts (à d’autres mythes ou à Star Wars ,le coup du pseudo sabre laser est d’ailleurs assez osé) ou changements, pourrait être un exercice intéressant.


Le Choc des cultures ou le christianisme a encore frappé !


Mais ce qui choque le plus dans ce fatras c’est que l’histoire des dieux est elle aussi entièrement revisitée.Violée même,à tel point qu’on peut la croire victime d’une tournante orchestrée par le vatican (mais j’y crois moyen,la mythologie est trop âgée à leur goût)…



Les Titans,ancêtres des Dieux ont été vaincus par Zeus doté de son foudre. Il libéra alors ses frères et sœurs,épousa et engrossa la plus jalouse et s’installa sur L’Olympe,histoire de se reposer un peu à la montagne après avoir enfermé les Titans dans le Tartare. Puissant ce Zeus ! Et bien dans le cadre du film,non seulement il a pas bossé en solo mais en plus c’est Hades qui a fait le gros du travail en créant de sa chair un être capable de vaincre les titans : le Kraken ! (nom scandinave mais passons !). Bref Zeus,Poséidon et Hades,formant une trinité ont vaincu le « mal » et se sont partagé le monde. Zeus aura le ciel, Poséidon régnera sur les mers et Hades sur les enfers. Les enfers ne sont pas pour autant semblables à l’Enfer tel qu’imaginé par les chrétiens.Mais c'était sans compter sur cette habitude de prendre le public pour plus con que ses pieds et inculte par dessus le marché.Hades devient ici une sorte de copie de Lucifer jalousant Dieu et jurant de lui prendre son trône. L’imagerie alliant fumée noire et souffre est alors attribuée à ce dieu qui n’en demandait pas tant,parceque merde quand même c'est oublier que le Hades en question il entretient aussi les jardins luxuriants des Champs Elysées (et je ne parle pas ici d'une célèbre avenue parisienne). Zeus devient donc un dieu d’amour mais colérique créateur de l'humanité ( rejoignant plus l’image de l’ancien testament) et Poséidon,vu la seule ligne de dialogue qu’il possède en plus de son trident, est sans doute le saint-esprit. Persée étant qualifié de sauveur lors d’un passage du film,tout se recoupe !
Et on ne nous épargnera pas les bons sentiments bien cul-cul la praline lors de la mort de certains personnages.





Le sauvetage visuel, car tout n’est pas à jeter.

Visuellement par contre c’est une autre paire de manches. Louis Leterrier est un fan des Chevaliers du Zodiaque. Le Manga,après la période « Hades » devait explorer le monde des dieux et l’on aurait apperçu leurs armures. Il n’en fut jamais rien. Vous en rêviez,Leterrier l’a fait : les dieux sont en armures,brillantes,divines. Les toges c’est fini,c’est la guerre que diable et les dieux sont équipés pour. Les décors ensuite, que cela soit le sol de la grande salle de l’Olympe bien pensée et tellement logique qu’on se demande pourquoi personne n’y a songé auparavant jusqu’aux décors naturels en passant par ceux du palais d’Argos,tout est beau et a sans doute couté un bras, une jambe, une tronçonneuse… tout comme les costumes et les accessoires.



Le bestiaire ensuite est de toute beauté. Si les scorpions géants ne sont que la représentation agrandie de bêbêtes déjà vues mille fois au cinéma ou en BD les autres créatures valent le détour. Une Méduse belle et repoussante, alliant un côté semi-erotique avec l’anatomie d’un serpent ( après tout, ne représente-t-elle pas une sorte de tentation ultime, celle qui peut vous tuer pour l’avoir désirée du regard ? et comme elle a été modelée d'après Natalia Vodianova,difficile de ne pas avoir envie de regarder),le passeur Charon ensuite et les djinns,guerrier de bois vivants adeptes de la magie noire. Le designer de production n’a pas chômé et s’est appliqué,la scène de la Méduse (que les héros rejoignent en radeau…)est sans conteste le meilleur passage du film.





Et au milieu coule une rivière d’ acteurs.

Liam Neeson en Zeus et Ralph Fiennes en Hades sont divins. Leurs dialogues sont de plus un peu mieux écrits que ceux des autres protagonistes mais leur aura aurait permis qu’ils récitent des absurdités sans pour autant qu’on ne soit pas subjugués par leur jeu.
Sam Worthigton ,malgré qu’on lui demande de faire une tête de gros dur tout le film durant arrive à bouffer n’importe quel acteur qui joue avec lui, son charisme débordant le fera aller loin et il confirme tout le bien qu'on pense de lui depuis Terminaor Salvation et - surtout!- Avatar.Mads Mikkelsen est quant à lui en grande forme (dans un rôle pas si éloigné que celui qu'il tenait dans King Arthur).




Reste le casing féminin qui ne brille pas : Gemma Arterton en Io n’est pas aidée par un rôle mal écrit (entre love interest et maître Yoda),quant à Alexa Davalos,belle Andromède (qui ne sera même pas attachée avec des chaînes, honteux de la part d’un fan de Saint Seya),son temps de présence à l’écran n’est pas assez important pour que le talent de l’actrice soit apprécié,chose qui ne lui arrive pas pour la première fois puisqu’elle fut découverte par Joss Whedon qui lui concocta un rôle spécialement pour elle dans la série « Angel » ( Gwen Raiden,riche voleuse possédant le pouvoir de moduler les ondes électriques mais privée de contact humains à jamais puisqu’elle électrocute tout ce qu’elle touche. Un rôle qui aurait pu être bien plus utilisé quand on connait l’amour que Whedon porte à ses personnages souffrant d’un rejet ) et qui n’apparût que dans…3 épisodes !



Le choc des Titans aurait pu (dû !) être un bon film. Un récit initiatique dans la plus grande tradition classique et dont regorgent toutes les cultures. Mais avec tant de trahison et de raccourcis scénaristiques et une fin en happy-end mal amenée,on se retrouve sans choc..et sans titans !On se croirait devant un film sorti des studios de la FOX. Autant relire Saint Seiya (et ses spin-offs). Et en parlant de Saint Seiya,voici une affiche alternative japonaise dessinée par Masami Kurumada,le père des Chevaliers du Zodiaque!


(nb: Le titre n'est pas de moi,c'est mon frère cadet Quentin qui me l'a suggéré.)

lundi 5 avril 2010

Le Codex Angélique

Paris,la belle époque. Un tueur en série,surnommé le croc’cœur par la presse, a déjà tué et volé le cœur de 17 jeunes filles. La police est sur les dents. Thomas Devisse est un jeune homme qui a perdu sa mère étant jeune et qui fut pris en charge par son oncle. Un jour,chez un bouquiniste,Thomas découvre un livre rare que recherche son oncle féru d’ésotérie depuis longtemps :le codex angélique. L’oncle de Thomas,savant ayant reçu un prix Noble poursuit le même but depuis des années : réanimer sa sœur plongée dans un caisson d’hibernation peu après qu'elle ait fait un arrêt cardiaque.


Le premier tome suit donc en parallèle l’enquête policière dans tout ce qu’il y avait de peu orthodoxe dans les méthodes de l’époque, la vie de Thomas qui erre de verres d’absinthe en maisons closes pour tenter de faire taire son mal de vivre et la quête de son oncle qui semble progresser à grand pas à la lecture du codex. Le premier tome tient en haleine,non pas que le scénario soit renversant mais par l’absence de temps et une gestion efficace des trois récits s’entremêlant.




Et il n’y a pas que les récits qui s’entremêlent. Si la reconstitution du Paris de l’époque est proche historiquement de ce qu'était la capitale Française ,le scénariste Thierry Gloris introduit des éléments qui ne feraient pas tâche dans un univers steampunk. Si l’idée est louable et permet d’aborder aussi bien la science-fiction que le fantastique, en la pratique le lecteur ne sait pas sur quel pied danser et se demande à quel genre appartient vraiment cette BD. Certes le mélange des genres n’est pas (et de loin) une mauvaise chose. Mais encore faut-il que la sauce prenne. Ce qui ne se fait pas entièrement ici. Et comme on retrouve en prime l’habitude quasi systématique quand il s’agit de récit historique de placer des personnages de l’époque (réels ou imaginaires) on se dit que les clichés ont la vie dure. On croisera ainsi Freud,le docteur Mabuse,Landru,au détour d’une case ou carrément comme faisant part intégrale du casting de personnages secondaires. Difficile de savoir si cela était vraiment nécessaire ou si l’auteur nous lance le message : mais regardez comme j’étale ma culture sans en avoir l’air. Mais ses dialogues sont si fluides et souvent bien amenés que l’usage des argots de l’époque ne semblent jamais être le fait d’un étalage culturelle,preuve qu’il maîtrise sans doute mieux son style d’écriture que les détails de son histoire (mais j’espère que cela évoluera dans le futur).




Cependant,même si l’on échappe pas aux traditionnels retournements de situation et au cliffhanger (mou du genou et pas vraiment bien expliqué) final, les aspects science-fictionnels et fantastiques du récit sont mieux gérés dès le tome 2 (pas parfaitement mais il y a un mieux,preuve que le scénariste dont le tome 1 était le premier travail pro s’améliore avec la pratique). Tome 2 qui offre une ambiance différente (et cela se répétera avec le troisième et dernier tome). Ainsi chaque épisode se voit doter d’une identité propre que cela soit dans ses enjeux ou dans son ambiance que l’on pourrait résumer comme suit ; Tome 1 : From Hell rencontre Frankenstein,Tome 2 : Vol au dessus d’un nid de coucou et Tome 3 : La genèse,Terminator et la divine comédie.
Ambiance magnifiquement restituée par Mikaël Bourgouin ,nouveau venu dont le trait et la mise en couleurs sont magnifiques mais qui manquent de vie,l’ensemble semblant terriblement statique,donnant l’impression que chaque case est la reproduction d’une photo. Mais ce détail n’enlève rien à la beauté intrinsèque des illustrations de cet artiste qui est appelé à refaire parler de lui.




Au final,Le Codex Angélique forme une trilogie en demi-teinte.L’aspect pseudo-esotérico-religieux qui se prend très (trop ! ) au sérieux ne m’a pas aidé à appréhender comme il le faudrait les enjeux que cet aspect en particulier donne au récit (je suis plus à l’aise quand cela est traité de façon plus décalée,comme dans Preacher de Garth Ennis et Steve Dillon par exemple,ou Spawn et Ghost Rider qui font dans la surenchère désamorçante). Cependant,les dialogues et les dessins sauvent l’ensemble et ,si ils n’accouchent pas d’une œuvre qui fera date, plantent les graines pour deux futurs auteurs dont on reparlera pour peu qu’ils évoluent un brin. Mais en l'état le scénario de cette série aurait tout à fait eu sa place dans la collection "Série B" de son éditeur : Delcourt,et seul la parure somptueuse offerte au scénario par Bourgouoin ne correspond pas aux standards en se plaçant bien au dessus du style graphique habituel de la-dite collection.

vendredi 2 avril 2010

Cœur froid pour soirée chaude.

Stephen King dit le plus grand bien de lui. Le premier roman que j’ai lu de cet auteur, Galilée, m’avait emballé malgré sa taille imposante, presque aussi gros que ma…enfin gros. C’est donc sans aucune crainte que j’ai acquis Coldheart Canyon de Clive Barker. Todd est une superstar.Acteur dans des blockbusters qui rapportaient des millions. Rapportaient, voila bien le problème. Car Todd commence à arpenter la pente descendante d’Hollywood : mauvais choix de films,son apparence de jeune premier s’estompe et les producteurs ne lui proposent presque plus rien car monsieur et son agente ont la grosse tête. Pour tenter de réussir un come-back,Todd consulte un chirurgien esthétique en vue de faire un lifting…l’opération, désastreuse, l’oblige à se retirer du monde le temps de trouver une solution. Il s’installe alors dans l’ancienne demeure de Katya Lupi, gloire hollywoodienne des années 30 qui était aussi belle que ses soirées étaient emplies de perversion (j'avoue que je me la suis imaginée à l'image de l'actrice X Sasha Grey).

Commencée comme une critique acerbe du systèmes hollywoodien (et assez bien vue bien qu’un peu de mauvaise foi se glisse dans le texte),le roman passe lentement mais sûrement vers un récit de maison hantée (à ceci près que les fantôme sont condamnés à rester dehors). Et une fois que Todd aura fait connaissance avec la maitresse des lieux,tout dérape. Certes on connait les obsessions de Barker ( si si,Hellraiser c'est lui quand même) comme le sexe,la souffrance,la difformité etc… mais l’aspect feutré laisse soudain place à du grand n’importe quoi horrifique.

Ce roman possède une réputation sulfureuse,qu’il ne doit à rien si ce n’est un chapitre orgiaque assez détaillé mais à l’ambiance malsaine (rappelant ,pour l’effet provoqué chez le lecteur,les parties de jambes en l’air de Patrick Bateman dans American Psycho et le risque d'érection qui s'en suit. Et croyez-moi,lire American Psycho dans un train bondé n'est pas une bonne idée....surtout quand il est bondé par la faute d'une colonie de vacances réservées aux adolescentes pré-pubères.).
Rien de bien méchant au final puisque presque tous les auteurs ont déjà tenté la scène de cul dans un de leurs ouvrages. Ici ça dure juste tout un chapitre et pas 10 lignes,c’est tout. Cependant, le sexe reste un des éléments que l’on retrouvera tout au long de l’intrigue mais dans une ambiance poisseuse et démoniaque (c’est le début du grand-guignol dans le roman puisqu'on y verra presque autant de sperme que de sang).

Si Barker avait amputé son roman de 200 bonnes pages et resserré l’intrigue autour de la demeure et du canyon qui donne son titre au roman,au lieu de repartir explorer le monde hollywoodien pour régler quelques comptes,il aurait pu pondre un roman de maison hantée moins classiques que l’accoutumée mais diablement prenant…ici on ne cherche qu’une chose,le finir au plus vite par acquis de conscience au cas où ça s’améliorerait en cours de route. Et bien ce n’est pas le cas,n'est pas King qui veut !

jeudi 1 avril 2010

Alléluia

Depuis plusieurs années,les amateurs de comics achètent des publications estampillées Panini Comics car cette compagnie vendeuse d'autocollants détient un quasi monopole dans nos régions sur ce média. Quelques éditeurs arrivent à braconner sur leurs terres mais un seul a une vraie reconnaissance des lecteurs : Delcourt. Hors suite à la crise financière ,et pour échapper à la ruine, les éditions Delcourt ont procédé a une augmentation de capital….ce qui vient de leur permettre de ‘’s’offrir ‘’ le catalogue des séries Vertigo de l’éditeur DC comics ainsi que toute série scénarisée par Neil Gaiman (et que cela soit chez Marvel,DC ou autre !). L’avenir ne vous semble-t-il pas un peu plus radieux maintenant ?

Deux pour le prix d'un

Robert Charles Wilson est probablement l’un des auteurs de science-fiction le plus intéressant de ces dernières années (et sans doute mon préféré avec le britannique Christopher Priest). Non seulement il brasse plusieurs catégories de cette branche de la littérature mais il le fait chaque fois en créant des personnages au profil psychologique fouillés et leur fait se poser les vraies questions que Mr Toutlemonde se poserait s’il se retrouvait dans une situation de ce type. Les extra-terrestres ont débarqué ! Merde est-ce que la boulangerie sera quand même ouverte demain ?

Darwinia et Les fils du vent sont deux œuvres de « jeunesse » de l’auteur. Il fait certes exister ses personnages bien mieux que beaucoup d’écrivains mais l’histoire du livre est encore plus importante ici que l’histoire vécue par ses héros. Broutille que cela. Mais si je critique ces deux ouvrages en même temps c’est parce qu’ils possèdent les mêmes qualités et les mêmes défauts !

Darwinia débute en 1912. L’Europe est remplacée par un nouveau continent,à la géographie proche mais aussi très différente de celle qu’on lui connaissait. Des espèces étranges et inconnues ont aussi émergés. Uchronie ? Monde parallèle ? Un peu tout ça ? Si le côté récit d’explorations existe bel et bien (et nous ramène au temps où les scientifiques quittaient leurs labos),il n’en est pas moins une simple partie d’un ensemble plus complexe.



Les fils du vent voit une famille dotée d’un étrange pouvoir,explorer les mondes parallèles, poursuivie par un mystérieux homme en gris. Qui est-il,d’où vient-il ? Autant de questions et de réponses qui surviendront dans un récit de fuite et de confrontation.

Je l’ai dit,les deux livres ont des personnages fouillés mais ils semblent plus subir l’histoire que la vivre. Le principal défaut est qu’en milieu d’ouvrage,les deux œuvres révèlent le pot aux roses. En détruisant le mystère,Wilson doit donc accélérer le rythme et transformer un récit intrigant en un récit plus centré sur l’action (mais avec de vrais morceaux de sentiments dedans quand même). On notera cependant d’étranges similitudes entre Les fils du vent et La trilogie « A la croisée des mondes » de Philip Pullman (signalons cependant que les histoires n’ont rien à voir,il s’agit de détails contextuels surtout…et Wilson a écrit son récit avant Pullman. Mais attaquez celui de Pullman aussi tiens ! Une trilogie classée dans la littérature "jeunesse" uniquement parce que les héros sont jeunes, heureusement elle a été ré-éditée chez Folio SF sans classification du lectorat!).