vendredi 29 mars 2013

Assassin's creed of Persia.

Un peu d'exotisme et de fantastique ce soir avec Le Lion du Caire , ouvrage sentant bon le sable chaud du désert dans la tradition des pulps des années 30 saupoudré de la modernité des années 2000.

Assad est un agent de la forteresse d’Alamut, base de la fameuse et véritable secte des assassins (rendue populaire par la série de jeux vidéos Assassin's creed).

Depuis une mission sanglante, il est entré en possession d’un salawar afghan habité par un djinn avide de vengeance.
Son maître l’exfiltre d’une mission pour l’envoyer au Caire où il devra conclure une alliance avec le Calife et protéger ce dernier contre tous les périls.

Autant dire qu’Assad va avoir du boulot car le Vizir se prend pour Iznogoud,le roi de Jérusalem lorgne sur la ville et le sultan de Perse, par Allah, a dépêché une armée pour prendre la cité (mais il n’avait aucun plan pour les pyramides, ouf). 
Le Caire est un vrai nid d’espions, de vipères et autres joyeusetés.

Scott Oden voit donc un de ses ouvrages publié pour la première fois en français. Ce n’est pourtant pas son premier roman puisqu’au pays de l’oncle Sam il a déjà publié plusieurs livres situés durant l’antiquité. Le moyen-âge période croisade est une première pour lui et il choisit de mettre en scène un musulman à la solde d’un groupe situé sur l’actuel territoire iranien. Dans un pays comme les USA il s’agit d’un joli pied de nez ! 

Le roman est très plaisant. Plein de rythme, de sous-intrigues, jamais tiré en longueur ( les chapitres sont presque au nombre de 100 mais sont très courts, il se passe plein de choses !!! ).

L’auteur joue franc jeu dès le début : son Caire n’est pas le Caire historique ! 
S’il a bien placé son intrigue au milieu du XIIme siècle, il s’agit d’un espace-temps déformé et un peu hollywoodien, où certains bâtiments et styles architecturaux en côtoient qui n’existaient plus ou pas encore à l’époque. 
Il glisse aussi un peu de fantastique (mais pas trop, c’est diffus et très bien dosé) pour parachever son ambiance. Et de ci , de là, il saupoudre son texte de vraies références historiques ( j’ignorais totalement que la secte des assassins d’Alamut avait subi un schisme et était entrée en rivalité avec son « ambassade » à Masyaf ).

Mais la grande force du bouquin (ou plutôt ses forces ) c’est de mixer avec bonheur les intrigues musclées et les coups tordus politiques ( bon, certes, on n’est pas dans Game of Thrones non plus) : les intrigues de palais sont servies par les hauts dignitaires, les ambassadeurs Templiers mais aussi par les courtisanes, les filles de harem…et les passages secrets ! 

Le Lion du Caire ne révolutionnera pas le genre, mais il offre un tour de montagne russe fun et inventif dans un environnement exotique enivrant que les amateurs de Prince of Persia et d'Assassin's creed (mais pas que ! ) devraient trouver à leur goût (surtout vu la piètre qualité des romans dérivés de cette série fort appréciée !).
On irait bien en refaire un tour : ça tombe bien, certaines sous-intrigues restent en suspend .
Signe que l’auteur reviendra vers Assad ? J’espère !


lundi 25 mars 2013

Dans les nuages !


4 ans et demi (presque 5 pour nous, pauvres européens pour qui le film a mis 5 mois à traverser l’océan) après l’échec critique ET public de Speed Racer ( qui reste, selon moi, une grande réussite technique loin d’être vaine ), la fratrie Wachowski* revient avec une œuvre qui sort des sentiers battus, comme d’habitude ai-je envie de dire : Cloud Atlas, adapté du roman de David Mitchell et co-réalisé avec Tom Tykwer (les imbuvables Cours Lola, cours et Le Parfum et le ¾ réussi The International.).

Dés le début du film, un personnage affirme ne pas aimer les artifices que sont les flashbacks (ironique pour un film construit plus ou moins selon le procédé du flashback et du flashforward).  Cependant, j’ai le sentiment pénétrant que si ce film est tout à fait appréhendable en tant que tel pour chaque spectateur, le cinéphile enragé ne saura pas faire autrement que de replacer Cloud Atlas dans la filmographie de ses réalisateurs principaux (je reviendrai sur cette notion, ne me crucifiez pas). Loin de moi l’idée de repasser tous leurs films ou scénarios (adieu le mésestimé Assassin et Bound, malgré mon amour pour le polar et les lesbiennes**) mais j’estime qu’une sacrée remise en contexte est, si pas nécessaire, très intéressante ! La critique en elle-même viendra plus loin, ne vous inquiétez pas.

Très tôt, les frangins écrivent un scénario basé sur le comic book V for Vendetta d’Alan Moore et David Lloyd.***. Celui-ci est rejeté mais Joel Silver, grand producteur à la Warner repère les Wacho. Il est emballé par leur idée de The Matrix : l’histoire est en marche.

The Matrix has you ! Knock Knock Neo !

En 1999, Matrix débarque de nul part et surprend son monde. Entre fable philosophique d’initiation, film d’action hollywoodienne, de kung-fu, de SF et de théorie du complot, le film se pose comme un mélange des genres explosif ! Le mélange des genres, au cœur même de Cloud Atlas ! Puisque le discours philosophique change à chaque film de la trilogie (ce que le spectateur ne pardonnera jamais à Matrix Reloaded et Revolutions : avoir osé s’éloigner du premier épisode et ne pas proposer deux faux remakes du premier film comme Hollywood le fait habituellement. The Lost World : Jurassic Park, de Steven Spielberg, s’était lui aussi pris une volée de bois vert à sa sortie pour les mêmes raisons. ) , il faudra se concentrer, selon moi, sur le thème de la liberté et de l’amour. Deux concepts que les cyniques de tous bords traiteront sans doute de cul-cul ( je n’irai pas jusqu’à leur souhaiter de vivre en prison privé de compagnie, mais vous avez saisi l’idée). Et pourtant !





Neo et V sont des libérateurs. Les épreuves que le système leur a fait subir les a menés vers un destin de sauveur christique, vers un destin de sacrifice. Une lutte effrénée, non pas vers l’anéantissement complet du système, mais vers la libération de ceux qui l’habitent. Neo offre la liberté à Zion en les déchargeant de la guerre contre les machines, il offre aux humains prisonniers de la Matrice le choix de choisir entre le monde réel et le monde virtuel. Il aurait été incapable de le faire sans amour pour Trinity. C’est cet amour passionné qui le ramène à la vie, c’est cet amour déraisonné qui le pousse à envoyer se faire mettre l’Architecte, brisant pour la première fois le cycle bien rôdé de l’élu.





V , par ses actes de déstabilisation d’un modèle tyrannique , expose les failles puantes d’un système fasciste et liberticide. Il fait comprendre que le sort des anglais n’est pas une fatalité. Comme Néo à la fin du premier Matrix, ses actions font voir aux gens que ce qu’ils considèrent comme l’impossible est possible ! Ce qu’il a entamé comme une simple Vendetta à grandes échelle, va se transformer en autre chose quand il va rencontrer Evey. Et bien que jamais aucune envolée lyrique ne vienne le dire clairement, de l’amour va naître entre eux. Et , parce qu’il est un grand personnage romantique d’antan, V va changer et considérer son combat d’un point de vue moins égoïste. D’un point de vue plus subversif, il est grandiose et ironique que l’agent Smith, symbole même de l’oppression de la Matrice, et V, symbole que la liberté n’est pas morte, soient incarnés par le même acteur !




L’envie d’échapper au système est également au centre de Speed Racer : un pilote décidant de ne pas laisser un univers corrompu lui dicter sa façon de courir en course. Vous voyez, tout se tient !






V for Vendetta, aboutissement de la liberté absolue.

Matrix et V ne se limitent pas à leurs thématiques. Il y a aussi une forme derrière tout ça. Une forme révolutionnaire pour l’époque. Car , en plus , de chercher à mettre en place des héros révolutionnaires , les Wacho vont tenter de révolutionner la grammaire cinématographique. De libérer les réalisateurs de toutes les contraintes techniques. Cette entreprise sera couronnée de succès : Matrix gagnera l’Oscar des meilleurs effets spéciaux. Mais une révolution si énorme que personne ne pourra plus employer les procédés qu’ils ont proposés sans passer pour un copieur ou un faiseur de parodie.

Speed Racer les verra s’affranchir de certaines conventions de montage ou de mise en image des dialogues,des combats, etc..Je le répète, d’un point de vue technique, Speed Racer est des plus intéressants et réussis ! Souvent con comme mes pieds, il n’en reste pas moins regardable pour sa virtuosité ( si on arrive à supporter l’univers coloré sous LSD, je vous l’accorde).



Cette liberté formelle ira encore plus loin avec V for Vendetta, pourtant avare en morceaux de bravoure visuelle : le film des Wacho est ici réalisé par un autre, James McTeigue, assistant réalisateur sur les deux derniers opus matrixiens. Pourtant, aucun doute possible, le film est sous leur contrôle (un peu comme un George Lucas laissant Irvin Kershner dirigé L’Empire Contre-attaque mais gardant la main sur tout). Ils iront même jusqu’à être la seconde équipe de tournage, s’assurant que les scènes emblématiques et hautement visuelles soient réalisées comme ils le souhaitent. Rien d’étonnant donc à constater que McTeigue, bon technicien, n’ai jamais plus offert autre chose que des produits bien emballés mais inférieurs ( Ninja Assassin et The Raven ). En laissant un autre réaliser leur film, les Wacho mettent à mal cette idée qu’un film est dû à la seule vision de son réalisateur : le cinéma est collectif****. Et Cloud Atlas va le prouver en enfonçant le clou.

Et quand je vous dis que tout est lié : c’est sur le tournage de V for Vendetta que les Wacho entendent parler du livre Cloud Atlas. Natalie Portman le lisait et leur a conseillé : effet papillon garanti !

La mise en chantier, une odyssée cachée.

Je vais être franc : la mise en chantier du projet m’était totalement inconnue avant 2011. C’est en surfant sur le forum d’un cinéphile bien plus borderline que votre serviteur que j’ai eu vent du projet. Intrigant et fou pensais-je. Intrigant, fou et foutrement bandant ai-je réalisé en voyant la première bande-annonce de près de 6 minutes qui passaient aussi vite qu’une bande-annonce classique. Si le projet avait échappé à mon radar c’est pour une bonne raison : aucun gros studio ne le produisait, personne n’était sur leur dos et personne n’a fait en sorte que le tournage soit suivi par des nuées de fans.
Tom Tykwer se montre intéressé  vers 2006 par l’adaptation de Cloud Atlas et rencontre donc  les personnes ayant acquis les droits du livre. Ce sont bien entendu les Wacho.
Très vite, le courant passe et l’idée d’un partenariat (le cinéma est un travail collectif) se met en place. Nos trois lascars défrichent le livre, écrivent le scénario, bossent tous ensemble avec les départements artistiques, etc…Une symphonie à six mains se met en place. C’est pourquoi, après 4 ans de travail commun, quand les réalisateurs partent chacun de leur côté mettre en boîtes divers segments du film, ils savent que la vision commune sera respectée.








Dans les nuages
Lorsque le film débute, le spectateur peut craindre la migraine.6 histoires nous sont présentées en un laps de temps très court. Le rendu de cette séquence pré-générique est maitrisé de bout en bout dans son envie de créer un beau bordel dans la tête du public. C’est un chaos total de 3 minutes. Mais il y a une chose à ne jamais oublier à propos du chaos, c’est qu’il en émerge toujours quelque chose !
6 histoires séparées dans le temps et étalées sur plusieurs siècles. 6 destins qui auront des répercussions sur ces siècles de déroulement. Une structure fort proche du très beau The Fountain.
On assiste donc à un voyage  en mer mouvementé vers San Francisco à l’époque de l’esclavage, à un drame poignant sur fond de romance épistolaire homosexuelle dans les années 30, à une comédie dramatique centrée sur une tentative d’évasion d’une maison de retraite tenue par une infirmière cintrée à notre époque, à une enquête journalistique qui dérange dans les années 70, à un film de SF dans Néo-Séoul et une aventure post-apocalyptique et sauvage à une époque mal définie.

Difficile de se lancer dans une critique de ce film sans tenter une certaine analyse poussée. Mais il faudrait beaucoup trop en raconter pour cela et déflorer beaucoup trop de surprises du film. Plutôt que d’en faire un film séparés en 6 parties distinctes, les Wacho et Tykwer ont décortiqué le fil conducteur et, par un habile jeu de montage qui aurait mérité un Oscar ( le film n’a reçu aucune nomination, même technique :une honte quand on voit le résultat ! ), ont créé un jeu de poupées russes jouissif. Millimétré au possible, ce montage permet de créer des portes entre les histoires : par un thème, un dialogue. Ainsi, un acte situé en 1850 peut ouvrir une (ou plusieurs) porte(s) sur l’intrigue située en 2144. Tout cela est d’une fluidité exemplaire.

Cette sensation de fluidité provient aussi des acteurs principaux qui endossent chacun 6 rôles dans le film. Par un jeu de maquillage poussé, ils apparaissent dans chaque segment : vieillis, rajeunis, changeant de sexe, de race etc…ce n’est jamais dit mais on le comprend d’instinct : chaque acteur est le réceptacle d’une même âme, se réincarnant au fil du temps.



Le Karma joue à fond dans le film et jamais cela n’est dit ou même sous-entendu par un personnage. Ce parti pris reste subtil mais peut mener à des situations cocasses ou désastreuses pour les personnages des intrigues. Mais jamais au grand jamais, le film ne boite. Jamais il ne se révèle opaque ou abscons. Son rythme haletant ( 6 histoires sur 2H45, cela fait moins d’une demi-heure par intrigue, cela va donc vite, très vite ) fait passer le temps en un claquement de doigt ! Si mes fesses ont senti le temps passé, mon esprit ,lui ,en redemandait ( le montage présenté au festival de Toronto en août 2012 était plus long d’une petite demi-heure selon témoin ) .



La mise en scène est virtuose et pensée dans le but d’une efficacité maximale : le spectateur est plongé dans divers univers mais il est capable d’y entrer de suite. Quand on pense son cadrage, son image et la disposition des éléments dans cette dernière (meubles, acteurs, figurants, etc..) de manière réfléchie, c’est en général ce qui se produit. Et le résultat est un sans faute. Aidé par des directeurs photos brillants et des effets spéciaux , qui sentent parfois l’artificiel certes, d’une beauté sans pareille, Cloud Atlas m’a offert certaines des plus belles images que j’ai vues au cinéma. Le film est à découvrir sur grand écran, c’est impératif !!!!
On regrettera cependant le manque d’ampleur de la bande-originale du film, ce qui est un peu fort lorsque l’on connait l’importance de l’écriture d’une symphonie par l’un des héros, symphonie qui traverse le film.



Tom Tykwer est ici un ersatz de James McTeigue, il tourne ses séquences visuelles pour les Wacho et pas pour lui, même si l’on sent sa patte sur certains choix d’acteurs comme Ben Whishaw qu’il avait dirigé dans Le Parfum (Grenouille, c’est lui ). Dans les séquences tournées par Tykwer ( toutes celles situés au XXme et XXIme siècle ), c’est l’acteur Jim Broadbent qui impressionne le plus : dégageant une aura malsaine voire carrément malfaisante en compositeur acariâtre, il passe pour un gentil bouffon quand il endosse la peau d’un éditeur fauché mais rusé qui tente de s’évader d’une maison de repos où il avait trouvé refuge face à une bande de malfrats. Cette histoire est d’ailleurs la bouffée d’oxygène du film, une pure comédie m’ayant arraché des éclats de rire (une scène avec un chat est d’ailleurs à se pisser dessus).




Et le grand paradoxe du film, c’est que les thèmes centraux gravitent en fait autour du fil conducteur du film (car oui, au milieu de toutes ses histoires, il y a un fil , diffus, pas aisément identifiable au premier abord. On le ressent plus qu'on ne peut le théoriser, du moins à la première vision : il en faut plus, c'est clair).
La liberté, encore elle, et l’amour, encore lui. La liberté face à l’esclavage, la liberté d’être, la liberté de la presse, la liberté de redécouvrir la vie, la liberté de prouver sa dignité humaine, la liberté face à ses démons et ses affres psychologiques. Quant à l’amour, il est le moteur ou la source de regrets des personnages. Jamais mièvre, il avance dans le film au gré de cette quête libertaire ! Ce qui fait qu’au final, dans la brume de notre esprit (car un tel film assomme de par son maelstrom d’idées qu’il faudra classer après les avoir digérées ) il y a un concept qui surgit : celui de faire savoir qui l’on aime ou carrément de tomber amoureux. À tel point que Jim Sturgees et Doona Bae sont tombés amoureux durant le tournage du film. Love was in the air !




Cloud Atlas est un film qui divisera car il ne peut laisser indifférent. En avance sur son temps ( tout comme l’était la trilogie Matrix, toujours incomprise dans son ensemble par le grand public, qui est allé la voir quand même, ce qui est rassurant), il s’est fait démonté par pas mal de critiques. Prétentieux est la moins pire des insultes qu’il a encaissé. Et bien moi vous voyez,  si un film qui ose bouleverser certaines conventions, qui ose rappeler et marteler sans grosses ficelles des concepts simples, évidents mais trop souvent reléguer au second plan ou encore qui étale un peu sa science pour provoquer la curiosité est un film prétentieux, alors je pleure. Oui je pleure, car si c’est ça l’idée d’un film prétentieux, je n’ose imaginer le vide abyssal que les critiques (et une bonne partie du public) attendent du cinéma !

Cloud Atlas est un film somme d'une folle ambition aussi bien sur le fond que sur la forme: un poème lyrique et violent, parfois d’une sauvagerie choquante mais jamais vaine, drôle, doux-amer et triste. Au travers du mélange total des genres, c’est un aperçu fascinant de bien des aspects importants de la vie qui nous est offert (la vie n’est pas cloisonnée par les genres littéraires, jamais !!!! ).
De la vie et de tout ce qu’elle peut offrir dans le bon ou le mauvais.
Un film comme un coup de poing dans la gueule, laissant une marque qui mettra du temps à disparaître ou qui, à jamais, laissera une cicatrice dans votre esprit, venant vous chatouillez les neurones et les sentiments de temps en temps.  Un appel vibrant à aimer et à vous rebeller contre l'injuste, à vous battre pour ce qui est juste ! Mais plus que tout, à ne jamais regretter !

-Quoi que vous fassiez, cela ne vaudra jamais plus qu'une goûte dans un océan !
-Qu'est-ce qu'un océan, si ce n'est une multitude de gouttes ?


Quand les fictions créent la réalité : les couples de l'écran deviennent le couple à la ville.






*Les frères Larry et Andy ne sont plus stricto sensu des frères : Larry a en effet changé de sexe pour devenir Lana.
** Oui, je suis un pervers, et alors ?
*** Non, je ne vais pas entrer dans une polémique sur les différences entre les deux. Parce que je m’en fous. Un livre, même adapté à la virgule près, restera un travail séparé. Et c’est le film qui m’intéresse ici.
****C’est pourtant évident : vous avez vu le nombre de personnes dans un générique de film ? Le ciné est un travail collectif et le réalisateur est le capitaine à bord du navire, la force inspiratrice des troupes (dans le meilleur des cas ).

jeudi 21 mars 2013

Ne laissez pas vos ennemis s'unir.


Ressortie en blu-ray du film épique de John Woo, Les Trois Royaumes dans une jolie édition intégrale reprenant les deux montages du film. Il était temps, la première édition atteignait des prix astronomiques en seconde main.

Lors de sa sortie en Occident, ce film chinois avait été présenté dans un montage de 2H30 pour ne pas rebuter le spectateur. Hors, en Chine, ce film a été présenté en deux fois (à la manière de Kill Bill chez nous) pour atteindre une durée de près de 5h.
D’où l’émergence d’une méthodologie pour la rédaction de cette chronique : devais critiquer le film présenté chez nous où directement attaqué la version intégrale ? Et devais présenter chaque partie séparément ou comme un tout homogène ? La solution que j’ai choisie est de critiquer les deux parties en une seule fois : contrairement aux chinois, je n’ai pas attendu 6 mois entre chaque sortie, c’est donc d’un bloc que j’ai vu le film. Pas de bol, Woo a pensé son montage comme deux films se suivant mais en n’hésitant pas à leur donner une identité propre à chacun.

L’histoire est assez simple : La Chine, en 208 après J.C, est sous le contrôle de la dynastie Han. Bien qu’unis sous la bannière impériale, la Chine est divisée en trois parties. Le premier ministre Cao Cao, pour assouvir sa soif de pouvoir, convainc l’empereur que les deux autres « nations » sont en rébellion contre lui. Face à un ennemi commun, celles-ci s’allient pour ne pas tomber sous la coupe de Cao Cao. Mais ce dernier fait-il la guerre pour le pouvoir…ou pour une femme, tel un Ménélas ?




Il faut savoir que l’histoire des trois royaumes est à la base un roman classique en Asie. C’est un texte important qui est lu aussi bien en Chine qu’au Japon par exemple (et l’on connait les antagonismes qui peuvent agiter ses deux peuples). Pour le spectateur asiatique, le contexte du film est clair et lisible au premier coup d’œil ! C’est d’ailleurs sans doute pour ça que certains ont décrit ce film comme une branlette nationaliste, oubliant que ce même schéma se répète chez nous avec certains films historiques ! Mais je m’égare.
La première demi-heure est donc assez lourde : il faut identifier les protagonistes ( dont les noms sont loin d’être simple, sans compte que l’inversion prénom-nom n’arrange pas toujours les choses, du moins en V.O. Et suivre du mandarin quand on ne connaît pas la langue…faut s’accrocher aux sous-titres ! ), leur allégeance, etc…
Une fois la situation bien posée, le film gagne en fluidité : les intrigues politiques et d’alliances coulent de source et tout est clair comme de l’eau du Yang-Tsé ( du moins à l’époque, de nos jours, c’est plus le Gange que le Yang-Tsé) ! Et le tout est saupoudré d’amour et d’humour sans en faire trop ni être gnangnan !


Comme il s’agit d’un récit que l’on pourrait qualifier de « mythologique », certains éléments sont un peu capilotractés , comme le fait de tenir une conversation par cithare interposée ou encore de voir des héros  accomplir des prouesses physiques au-delà de la vraisemblance (ce que Wolfgang Petersen avait choisi d’effacer de Troie, pour le meilleur ou le pire selon votre degré d'appartenance aux puristes.Tentez d'ailleurs la version longue de ce péplum dont les ajouts, conséquents, pourraient vous faire voir le film d'une autre façon, tout comme le Alexander d'Oliver Stone ) : quand un personnage est réputé valoir 100 hommes, attendez vous à le voir dézinguer 100 gugusses facilement (même si cela se résume à un combat mano a mano avec les 99 autres qui exécutent une danse vaguement menaçante en attendant leur tour ).

Cette esbroufe visuelle n’empêche pas John Woo de mettre en œuvre des scènes plus réalistes, d’une rigueur militaire millimétrée et ce sans jamais se répéter dans sa manière de faire : que la  bataille soit rangée grâce à une formation inhabituelle, totale lors de l’assaut final ou encore navale lors d’une séquence anthologique, Woo ne sacrifie pas aux effets faciles.Oh il y aura bien des ralentis ( qui sont sa marque de fabrique, revoyez Volte/Face ) ou des zooms avant et arrière rapides ( mais cela reste un artifice de la grammaire cinématographique asiatique, il convient donc de ne pas trop l’analyser à l’occidentale) mais rien de vraiment dérangeant. Il livre d’ailleurs des images époustouflantes tant dans la barbarie guerrière que dans le calme de la vie privée des protagonistes : le sens du cadrage et de la mise en image est assez poussé, le tout rehaussé par une photo somptueuse qui offre des contrastes flatteurs pour l’œil !





Bien entendu, notre organe visuel ne pourrait en prendre autant dans la vue ( si j’ose dire ) sans une reproduction de qualité : les costumes et les décors (naturels ou non ) ont été soignés dans les moindres recoins. Un enchantement de tous les instants ! On sent où l’argent est passé !





Comme je le disais plus haut, Woo a donné une identité propre à ses deux parties. Rien de vraiment grave, juste quelques petites chipoteries (mais j’aime bien chipoter, je pense que ça se sait depuis le temps).
Ainsi, le premier film s’ouvre sur un générique en CGI lorsque le second voit son générique inclus à même les séquences filmées.
Lors du premier film, le montage utilise souvent la technique du fondu pour passer à une autre scène quand le second simule que l’image est une feuille de papier que se déchire. C’est aussi dans le second film que l’on retrouvera certaines idées de montages plus ébouriffantes mais très soignées (comme cet écran splitté car il suit la volée de plusieurs flèches tirées en même temps !).


Au final, pour peu que la façon de faire des asiatiques ne vous dérange pas, Les Trois Royaumes est une grande fresque guerrière qui ne pèse jamais sa longueur de 5 heures et dont l’aspect plus exotique permet non seulement de voyager dans le temps mais aussi dans un monde qui nous est moins familier (et donc plus intrigant). Vivement conseillé !

vendredi 1 mars 2013

L'exception culturelle hexagonale.


Sous le règne de Nicolas 1er, l’homme qui faisait passer Napoléon pour un géant, le ministre en charge de la culture (et parfois aussi du tourisme sexuel à la thaïlandaise ) était certes un homme cultivé mais avec les mains liées dans le dos par les délires impériaux . Bien que renversée par le peuple de France il y a un an, les soldats de type «  HADOPI » de son altesse minuscule continue d’arpenter les rues.

À la tête du pays du fromage, la populace, toujours attirée par le paradoxe, a placé un gouda ! Vive Gouda 1er donc et sa ministre de la culture, jamais avare en gags pour tenter de nous faire rire…ou pleurer !

Car après l’énorme succès de «  Les livres écrits par les éditeurs » (théorie redéfinissant à jamais le concept de l’édition à compte d’auteur, si si si !!! ) , «  La variété du cinéma français assurée par le CNC » ( dévoilant là un sens aigu du cynisme de la ministre ) et « La BD c’est rien que pour les enfants «  ( un peu comme les biscuits Petit écolier donc . D’ailleurs n’en mangez pas en lisant vos BD’s les enfants, vous laisseriez des miettes entre les pages du seul média à pulvériser les records sur la violence et la nudité frontale), voila qu’Aurélie Filipetti a eu une idée LU-MI-NEU-SE : «  Et si on comptait les femmes tuées dans la fiction ? »

Et si tu fermais ta gueule un peu ? Voila ce qu’un leader, un premier ministre ou tout autre collègue soucieux de l’image du gouvernement aurait dû lui répondre ! Parce que derrière cette idée bobo et bien-pensante ( bobo et bien-pensant  n’est pas complètement un pléonasme, même si je vous accorde que c’est vrai à 95% ) qui pue le féminisme mal pensé ( celui qui fait la une des journaux mais que la majorité des femmes ne suit pas ) se cache une aberration :Madame la ministre ne connaît pas son dossier ( étonnant vu les âneries rapportées plus haut, vous ne trouvez pas ? ) ! Encore une fois, serais-je tenter d'ajouter...mais je n'en ferai rien.

Alors, chère ministre, laissez-moi vous conseiller de regarder plus attentivement vos fictions nationales (oui je sais, c’est un conseil cruel …mais il faut parfois faire des efforts !) et repensez-y ! Parce que si vous voulez vraiment la parité, alors attendez-vous à ce que le nombre de femmes tuées, violentées ou battues explose dans les futures productions de votre si beau pays. Si c'est cette image que vous voulez répandre, alors le concept de misogynie vient de franchir un nouveau pallier. Mais je subodore plus votre adhérence à une caste que Michel Audiard aimait descendre dans ses scénarios...