Bastien est paléontologue. Sa grande passion est de rédiger une encyclopédie sur les bestioles nées dans la vape, cette substance ayant recouvert le globe. Pour cela, il peut compter sur son ami Ernest, explorateur qui arrondi ses fins de mois en vendant des spécimens à son ami scientifique lorsqu’il revient d’expéditions financées par « La Compagnie » . Nos deux larrons vont être mêlés à une série d’évènements rocambolesques dans un monde en mutation tant naturelle que sociale.
Il ne faut pas juger un livre sur sa couverture. C’est un fait avéré. Cependant, l’on peut s’attendre à ce que celle-ci reflète un tant soit peu l’intérieur de ce qu’elle protège contre le passage du temps. Il en va de même pour le titre d’une œuvre, indication de ce vers quoi l’on s’apprête à plonger avec fébrilité lorsque l’on s’attaque aux premières pages.
Et là, c’est un peu le drame. Ni l’illustration de couverture, ni le titre ne reflètent la substantielle moelle de l’intrigue du roman. Situé dans un environnement steampunk plus ou moins ouvragé ( la construction politique de ce monde est assez floue, peut-être pour être développée dans une éventuelle suite ? ) , les passages d’aventures en forêts sont une partie congrues de l’intrigue. Alors que couverture et titre, au diapason, semblaient annoncer une traversée à la « Avatar/Predator chez Lovecraft », le roman empile les phases urbaines.
Et cette ville ressemble peu ou prou à n’importe quelle cité steampunk un tant soit peu avancée que l’on a croisé par le passé en tant que lecteur féru d’imaginaire ( si c’est votre première fois par contre, vous vous amuserez bien plus ). Et dans cette ville où vit notre Bastien, héros principal, et bien de sombres choses s’annoncent. Bastien survit coup sur coup à deux attentats ( la suspension d’incrédulité à des limites : vous avez plus de chances de gagner au loto que d’être pris dans un tel évènement odieux ) , trop à l’écoute de sa gouvernante qui ne fait pas confiance aux policiers, Bastien décide de jouer les détectives amateurs…en allant directement prévenir un suspect qu’il sait des choses ( oui, le héros est un François Pignon digne d’être invité à dîner le mercredi soir ). Coïncidences et bêtises crasses de notre pied nickelés font doublement grincer des dents : 1° car c’est à se taper le front devant tant de naïveté et 2° tellement le procédé souligne au gros fluo rose bonbon que l’auteur ne savait faire avancer son intrigue que grâce à ces facilités d’écriture.
Et pour couronner le tout, Colin Heine surcharge son intrigue avec une histoire alambiquée de confrérie secrète de tueurs, histoire d’ajouter un peu de suspense dans sa soupe.
Car l’environnement urbain est moins érotiquement dangereux qu’une jungle remplie d’animaux mutants et ne cherchant qu’à bouffer de l’humain en expulsant des tripes partout. C’est dommage, l’auteur n’avait-il pas un tel lieu à disposition ?
Mais au-delà de la bêtise du protagoniste, il y a les idées politiques sous-lignées à l’encre noire que l’auteur distille au fil des pages. Tous les clichés du petit bobo de gauche manichéen y passent. Sans jamais chercher les nuances de gris , Heine décrit les compagnies comme toute dirigées par des monstres heureux d’être des salauds, les ouvriers (même plus aisés, comme les explorateurs de talent tel ce bon Ernest, peut-être le seul personnage un peu sensé dans cette histoire, et encore ) sont tous des victimes du systèmes, les forces de l’ordre sont le mal absolus, des séides de Darth Vader en personne dont le seul but dans la vie est de répandre la violence dans les plus basses classes sociales. Et soudain, pour enfoncer le clou, on notera l’abjection littéraire. Alors que « les forces du mal » défouraillent du « gueux » à tout-va dans des descriptions à mi-chemin entre le clair et le flou, l’auteur prend un plaisir sadique à décrire bien sordidement les mises à mors ( sans doute méritées de son point de vue ) des rares forces de l’ordre qui passeraient sous le fil des prolétaires. Car oui, certains méritent de crever comme des chiens dès lors qu’ils travaillent pour un gouvernement.
Chaque mort violente est le constat d’un échec, mais pour Heine, certaines morts violentes se doivent d’être décrites, à la limite du mode d’emploi.
Mensonger dans ses promesses, idiots et alambiqués pour se donner une fausse épaisseur thématique et politiquement puant de par son manque de nuances, voila un roman qui, s’il avait été écrit pour être subversif et dérangeant ( tant sur nos sociétés que sur comment l’environnement va se retourner sur lui-même, nous entraînant dans ses torrents de boues et de bois ) n’en est qu’un manifeste déguisé de qui est bon et qui est mauvais. Une arnaque.
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