jeudi 3 mars 2011

Le crime ne paye pas.

En France et en Belgique,le marché des comics en VF est dominé par le groupe panini. Avec les licences Marvel,DC, Vertigo et quelques autres d'éditeurs moins connus,Panini occupe toute la Gaule comicvore ! Toute ? Non, quelques irréductibles éditeurs résistent encore et toujours. Parmi les plus célèbre on peut nommer Delcourt (qui est aussi le plus sérieux ) mais également la maison d'édition Soleil (avec sa collection Soleil US) ou encore Milady Graphics (branche des éditions Bragelonne). Un nouveau joueur est arrivé récemment , les éditions Emmanuel Proust. Celles-ci lancent donc non sans fierté un polar d'anticipation en 3 tomes: The last days of american crime. Le pitch est simple : d'ici deux semaines l'argent liquide n'existera plus, rendant ainsi caduque tous braquages etc…mais plus fort encore,une onde,l'IPA (initiative de paix américaine ) va être lancée. Une onde de contrôle mental empêchant les citoyens d'enfreindre la moindre loi. Cette information qui devait rester secrète provoque une vague d'émigration vers le Canada et le Mexique où les personnes réclament le statut de réfugiés politiques. Les frontières se retrouvent alors bouclées.


Graham est un briscard du crime et il a un plan. Le dernier casse avant que l'IPA ne soit activée. Il monte une équipe dans l'urgence avec Shelby une hackeuse et Kevin un homme de terrain. Mais dans l'ombre,alors que le crime est sur le point de s'éteindre, certaines personnes décident de profiter du dernier casse américain en s'appropriant le plan de Graham.

Chaudement recommandé par mon revendeur habituel de BD qui me vantait ses qualités en employant des phrases comme " ce qui se fait de mieux dans les comics américains", The Last Days of American Crimes est donc vite tomber dans mon sac de courses. Mais quand on y réfléchit deux secondes, mon chère revendeur ne lit aucun comics de super-héros…alors comment diantre pouvait-il affirmer que c'était ce qui se faisait de mieux si il ignore sciemment une grande part des comics ? Cela aurait dû me mettre la puce à l'oreille.

Voila un comic violent. Très. Trop. Une violence parfois outrancière. Sous prétexte que le crime va bientôt disparaître, l'auteur Rick Remender écrit des séquences d'une rare sauvagerie, comme si les malfrats voulaient jouer les bouchers une dernière et magistrale fois. Il décrit aussi la future reconversion de la mafia dans l'après-crime mais sans approfondir la chose. Le tout pour masquer les faiblesses de son histoire de départ : la braquage bien huilé. Car il ne s'agit que de ça, un braquage audacieux dans un cadre certes un brin inhabituel mais qui n'échappe pas aux grosses ficelles du genre : la balance, le traître,le twist final, le happy-end qu'on sent venir à 15 kilomètres (tel le rapace à tête rouge, créature ayant la plus grande faculté olfactive sur Terre) etc…Les péripéties qui jalonnent le parcours des protagonistes de la mise au point à l'exécution du plan sont loin d'être stressantes. Et les autres parties sont traitées par-dessus la jambe. Remender aurait dû se concentrer sur son histoire de casse et bosser bien plus son scénario. Mais avec un titre comme les derniers jours du crime, il s'est attelé à décrire les derniers jours du crime,et le crime est une notion très large. Et il n'avait tout simplement pas la place pour ça. Le mieux est l'ennemi du bien et à vouloir trop en raconter dans un espace restreint il loupe le coche sur tous les tableaux. Il y avait là matière à tirer une longue fresque des dernières activités criminelles tous secteurs confondus. Mais seulement si l'espace disponible l'avait permis et que le scénariste manie le polar… n'est pas Michael Brian Bendis ou Ed Brubaker qui veut.Sans compter que la réflexion possible sur le contrôle mental de la population aurait sans doute pu être poussée, décortiquée par le scénariste…mais il ne s'en sert que comme un vulgaire prétexte !!

Les dessins de Greg Tocchini oscillent entre le bon et le passable et celui-ci accentue les côtés gores et sanglants tout aussi inutilement que Remender n'écrit des scènes violentes que pour le plaisir d'écrire de la violence ( la scène du motel dans le tome 2 en est un parfait exemple, mais je n'en dirai pas plus pour ceux qui voudraient tenter la lecture). La raison de tout ce gore,cette violence,cette simplicité, ce happy end est explicable et saute au yeux : l'envie des auteurs que The Last Days of American crime devienne un film. Tout est réuni pour faire mouiller les slips des dirigeants de studios : de la violence, un peu de cul soft, une pseudo-dénonciation de l'état cherchant à tout contrôler y compris nos esprits, le crime comme dernière expression de vraie liberté…tout est réuni pour qu'Hollywood mette en chantier une adaptation.
















La traduction n'est pas honteuse mais il me semble avoir trouvé une ou deux fautes de grammaires. Rien de bien méchant (on a vu bien pire chez Panini) mais il serait heureux que cela ne se reproduise plus à l'avenir. Pour un galop d'essai cela peut à la rigueur se comprendre. Mais après il faut s'améliorer et ne plus reproduire les mêmes erreurs ! La qualité du papier est bonne. Un papier glacé dans une belle reliure et des bonus en fin de chaque tome sont présents. Appréciable mais pas au point de justifier un prix si élevé : 15€ par tome ( 17 à 18 en Belgique) de 64 petites pages. Cher,bien trop cher pour une œuvre somme toute très anecdotiques que seules les couvertures réalisées par Alex Maleev sauvent graphiquement. Une flacon magnifique mais sans l'ivresse.








Malgré tout ce que je peux dire,j'avoue être sans doute un peu ,mais juste un peu,trop dur. Quand on vous vent une histoire comme un chef-d'œuvre on s'attend à être secoué. Ce ne fut pas mon cas,j'en attendais peut-être trop qui sait ? En tous les cas,le site de l'éditeur annonce qu'il n'en reste pas là niveau comics car ce mois-ci devrait paraître le premier tome de l'adaptation du roman de Philip K.Dick " Do androïds dream of electric sheap ?" par Tony Parker (non,pas le basketteur rappeur). Ce livre avait été librement adapté par Ridley Scott sous le titre "Blade Runner". Si les éditions Emmanuel Proust corrigent leurs petites erreurs de jeunesse en matière de comics, peut-être transformeront-elles l'essai. Je l'espère de tout cœur,je suis un grand fan de Blade runner et j'avais bien aimé le roman également.

2 commentaires:

Matt Murdock a dit…

En effet, c'est du bon petit polar, mais ce n'est pas le comics du siècle.

L'auteur respecte presque trop les codes cinématographiques du genre, à tel point qu'il est fort possible que vendre les droits était l'objectif de départ (on sait déjà que Sam Worthington devrait être amené à jouer le rôle principal).

Geoffrey a dit…

C'est presque un story board en fait leur truc :s ...Worthington est un peu jeune pour le rôle je trouve mais il a tellement de projets en suspens etc que d'ici là l'acteur aura peut-être changé.