mercredi 26 juin 2013

Lisons un peu dans notre Forteresse de Solitude.

En novembre dernier, sortait un énorme bouquin ( grand fortmat, 300 pages ) sur les coulisses de la trilogie que Christopher Nolan a consacré à Batman.
Pour la sortie au cinéma de Man of Steel, point de délais et c’est donc quelques jours après son apparition dans les salles obscurs que sort Man of steel : Dans l’univers légendaire de Superman.

Bon, on va pas tourner autour du pot trop longtemps sinon on risque de ne pas manger la confiture : ce making-of livresque n’est pas aussi fouillé, pas aussi soigné que celui consacré aux travaux de Christopher Nolan. Il s’agirait plutôt d’un bel art-book amélioré.

Car visuellement, ça claque. Des centaines de dessins préparatoires, de concepts ( avortés ou non ) sont présentés . La recherche et la réflexion autour de l’architecture, de la faune et de la flore de Krypton sont présentées.
Même la langue et l’alphabet ont fait l’objet d’idées avancées ( on se demandé dès lors pourquoi TOUS les aliens parlent anglais). La méthode de travail de James Cameron pour créer la planète Pandora dans Avatar est ici appliquée au monde d’origine de Superman ( pour un temps de présence réduit, fatalement ) et il est intéressant de lire les processus qui ont conduit à l’élaboration de tout ceci.

Pareil en ce qui concerne la partie terrienne de la chose qui consistait à trouver des endroits typiquement américain sans jamais tomber dans la caricature facile de l’imagerie des petites et grandes villes. On regrettera qu’aucun mot n’ait été écrit sur la conception musicale et sonore par contre.




Non, là où le bas blesse, c’est au niveau des anecdotes de tournages. On en sait finalement très peu sur cet aspect très important. Contrairement au livre sur Nolan qui détaillait pourquoi-ci, pourquoi ça, celui-ci survole la chose. Et c’est bien dommage, on aurait aimé faire plus qu’effleurer la surface. La couverture est par contre superbement ouvragée et évoque l'aspect cote de maille du costume de Superman dans le film, le symbole en S est en relief et donne envie de le tripoter ( non, ce n'est pas sale) pendant des heures.

Et si  40€ pour un beau livre est sans doute un prix assez commun pour ce type d’ouvrage, il n’en reste pas moins que le même prix pour le livre sur Batman ( chez le même éditeur, Huginn & Munnin ) nous donnait accès à presque le double de page, dans un format plus grand. C’est dommageable car les « making-of » écrits publiés chez eux jusque là (Alien, la trilogie TDK) était épais et super intéressants.

La traduction est en partie de Ed Tourriol, traducteur de comics, et elle est de qualité. Mais on notera une ou deux erreurs factuelles qui me semblent être des soucis de traduction, comme lorsque Superman est confondu avec le Dr Manhattan…dans la bouche de Zack Snyder.

Ce livre n’en reste pas moins une pépite visuelle explorant tout l’aspect créatif et donne donc un éclairage intéressant et clair sur les divers processus de création d’un univers nouveau et entier qui parlera à tous. La pertinence cinéphilique est par contre trop absente pour les obsédés ( comme moi ) de tournage et de mise en scène.

Les art-books consacrés aux derniers films de Zack Snyder, Watchmen et Sucker Punch, outre-Atlantique, ont l’air plus fouillés ( 70 pages environ de plus ) et malheureusement, n’ont jamais fait l’objet d’une traduction dans nos contrées.

 C'est déja une autre épaisseur.


mardi 25 juin 2013

Girl of style.

L’an dernier, alors que la promo du dernier film en date sur Batman, The dark knight rises, battait son plein, Urban comics éditaient chez nous plusieurs titres consacrés à la chauve-souris gothamite. Cette année, rebelote donc mais cette fois-ci avec le grand bleu au S rouge.  Débarque donc en librairie ce Supergirl : la dernière fille de Krypton.

Au cours des ans, Supergirl, alias Kara Zor-El, la cousine germaine de Kal-El a connu plusieurs incarnations et changements de look et de style, voire d’histoire. Mais celle qui revient toujours cycliquement et dont on ne risque pas de s’éloigner avant un long moment c’est celle d’une jeune ado de 16-17 ans, qui servait de baby-sitter à son cousin et qui fut envoyée dans l’espace par son père, Zor-El, en état de cryogénisation. Lorsqu’elle débarque enfin sur Terre, elle n’a pas vieilli…mais son cousin est déjà un homme fait, un héros !

C’est donc sur ce canevas que les scénaristes Michael Green et Mike Johnson décident de se coller. Au début, la peur peut vous assaillir devant ces noms. En effet, les deux hommes ont officié sur la série télé Smallville, ce qui a de quoi donner des sueurs froides même aux plus endurants d’entre nous. Et là, miracle.

Parce qu’ils vont s’amuser et sortir d’un carcan trop connu. Lorsque Kara débarque, celle-ci est désorientée et ne se rappelle pas de comment elle est arrivée là. Pour elle, trois jours plus tôt, elle était encore sur Krypton. Lorsque Superman débarque, elle refuse de croire qu’il s’agit de Kal-El et que Krypton a été détruite. Elle rejette son aide. Erreur fatale. Car dans l’ombre, un multimilliardaire mégalomane a décidé de l’étudier.
On pourrait regretter cette facilité scénaristique qui consiste à donner son «  Lex Luthor » à Supergirl mais les motivations des deux antagonistes de cette super-famille ne sont pas les mêmes.
De plus, la fin du premier arc narratif contenu dans ce tome va donner des motivations vengeresses à notre méchant de l’historie.

L’histoire est agréable à lire, très fun et sans aucune prise de tête mais en oubliant d’être conne. La quête de Kara est intéressante à lire, son schéma narratif étant à l’opposé total de son cousin. Alors que ses pouvoirs se développent presque instantanément à son arrivée sur Terre ( elle est déjà presque adulte et les filles, c’est bien connu, sont souvent matures physiquement  avant les garçons), celle-ci veut retourner chez elle. Et sa quête, perdue d’avance, en est pourtant touchante. 




Les auteurs s’amusent aussi à tenter de concilier les divers aspects de la technologie kryptonienne aperçue durant diverses périodes éditoriales.
Ainsi, on retrouve aussi bien la technologie futuristes des écrans holographiques ( Birthright ) que celle basée sur les cristaux ( comme dans le film de Richard Donner ou Superman :origines secrètes).
Cependant, nos deux larrons ont confondu l’arrivée de Kal-El sur Terre avec celle de Kal-El dans la série Smallville, du coup, une référence à la pluie de météorites ayant accompagné Superman lors de son atterrissage dans la mauvaise série télé est émise.




Les dessins de Mahmud Asrar sont élégants. Ce dernier possède un bon sens du découpage pour son story-telling et ne perd jamais le lecteur. Certes, on aurait sans doute aimé un peu plus d’originalité dans la représentation de certains concepts de SF terriens mais rien de grave. Bref, Supergirl est tout ce que Superman (Action Comics) n’est pas : agréable à lire, fournissant un personnage intéressant psychologiquement et ne tentant pas d’alambiquer pour rien un récit linéaire qui s’assume ! 

Les différents styles de Supergirl à travers les âges !

lundi 17 juin 2013

Superman Begins in Smallville !

Son nom commence par  «  S » et il fête ses 75 ans d’existence cette année. Non, je ne parle pas de Spirou …mais de Superman ! L’homme de demain, l’homme d’acier, le dernier fils de Krypton ! Et quoi de mieux pour marquer le coup qu’un film à grand spectacle sur cette homme fait Dieu ?

75 ans, c’est le temps d’une vie.
Et cette vie a été bien remplie pour Superman qui a vu son histoire racontée et racontée encore  des dizaines de fois. Mais toujours en gardant les bases : sur la lointaine et agonisante planète Krypton, un scientifique et sa femme placent leur enfant unique dans une navette spatiale pour le sauver. Arrivé sur Terre, l’enfant développe des facultés extrahumaines et devient le premier super-héros, presque un dieu sur Terre mais définitivement un messie.

Car Superman a été créé par deux jeunes auteurs juifs américains. Une religion qui attend le messie et dont le folklore du XVIme siècle lui a adjoint un protecteur, le tout puissant Golem. Superman est à la fois le messie (envoyé par un père vivant tout la haut dans le ciel, capable de miracles, etc…) et le Golem (protecteur de tout un peuple, le peuple humain dans le cas qui nous intéresse ici ! ).

Et croyez bien que tout ceci est une version simplifiée voire simpliste. Des comic-books aux films en passant par de multiples séries télévisées, Superman a posé ses bottes rouges dans la pop-culture et dans l’inconscient collectif pour toujours avec des résultats qualitatifs plus que variables (le meilleur film sur ce héros étant à mon sens Superman Returns de Bryan Singer ).




La Genèse 

En 2003, à la sortie de Matrix Revolutions, je me souviens avoir pensé que l’homme qui reprendrait Superman au cinéma aurait un challenge d’une taille astronomique. En effet, l’ultime combat entre Neo et l’agent Smith prenait des allures de baston titanesque digne de Dragon Ball , des dieux antagonistes lancés dans une bataille dantesque aux proportions bibliques ! En 2006, Bryan Singer, ayant pourtant mis en scène les deux premiers X-men ( et donc tâté de la mise en scène chorégraphiée de luttes entre surhumains ) a choisi soigneusement d’éviter ce terrain tout en assurant le sens du spectaculaire.




Si un mec arrivant à sauver un avion en flammes et en perdition , vous trouvez pas ça spectaculaire, je peux rien pour vous bande de blasés de la vie !

En 2013, Zack Snyder met en scène l’approche inverse ! Superman va se friter avec d’autres métaphores Nietzschéennes  à la sauce belligérante. Après tout, lui aussi a déjà magnifié des demi-dieux en filmant la très réussie réflexion sur l’impact des super-héros sur le monde : Watchmen ! Passer à Superman est donc une évidence thématique en soi !



Aux origines de ce nouveau film, on vous citera Christopher Nolan. L’homme a prouvé avec sa trilogie  The dark knight   que le super-héros pouvait être traité de manière sérieuse au cinéma ( ce qui était déjà le cas dans les comics des années 80, la littérature, sous toutes ses formes, est souvent en avance sur le cinéma média de masse et non pas d’initiés, ou si peu ). Il a ouvert la voie à des films comme Watchmen d’ailleurs ( qui est un comic sorti...dans les années 80 ! Tout se tient ma petite dame ) !
Mais il faut un peu remonter le temps pour comprendre pourquoi la Warner a donné le feu vert à Nolan et Snyder.

Superman Returns a été un échec commercial (mais pas artistique !!! ), le film le plus cher de l’histoire du cinéma n’a pas rapporté assez pour que le projet de sa suite ( qui devait s’intituler, tenez-vous bien, Man of Steel pour surfer sur la vague du surnom comme The dark knight ) soit mise en chantier tout de suite.Le score au box-office était plus qu’honorable mais le budget astronomique fait relativiser considérablement le-dit score pour les financiers sans imagination.Car Superman Returns, dont le budget est officiellement de près de 300 millions de $  ( chiffre à relativiser, les petits comptables ayant porté dans l'équation les sommes astronomiques  perdues lors des tentatives avortée de relancer Superman au cinéma et ce sur une période de 20 ans ) en a rapporté 391,soit un score avoisinant celui d'un certain Batman Begins !





Cet homme, en ne jouant pas dans un film qui ne s'est jamais fait ( Superman Lives, que devait réaliser Tim Burton ) a coûté 20 millions de $ à la Warner. L'essai costume le plus cher de l'histoire du cinéma.

 Krypton, telle qu'elle devait être dans le film que Tim Burton ne tourna jamais.


Deux versions du costume dans le processus de recherche artistique du film de Burton. Mine de rien, les dessinateurs responsables sont aussi rémunérés. Rien que pour ce projet avorté, la Warner a perdu  près de 30 millions de $. Tous répercutés sur le budget du film Superman Returns.Comment attendre dès lors qu'il soit un succès commercial majeur s'il doit essuyer les plâtres de 20 ans de dépenses inutiles ?

Pourtant, Singer et ses scénaristes ont laissé des bases dans leur film pour développer de nouvelles histoires ( la nouvelle Krypton en orbite, des extraits du sang de Superman, etc…) mais au final, la Warner dit NON. Priorité absolue est mise sur Batman ( devons-nous vraiment prendre en considération l'erreur et l'échec Green Lantern ? ) qui rapporte bien plus qu’un héros pourtant plus fédérateur comme Superman. Et quand l’homme derrière Batounet rapporte plus d’un milliard de $ de recettes par films, on l’écoute quand il dit vouloir produire un film sur l’homme d’acier.



Notons que niveau dépenses inutiles, Bryan Singer y a mis aussi du sien. Les deux dernières photos proviennent d'une scène coupée, Superman visitant les ruines de Krypton, qui a coûté la bagatelle de 10 petits millions de $ pour 6 minutes de film.


Man of Steel naît de la même dynamique d’écriture que Batman Begins. L’envie du studio de faire table rase du passé et une équipe connaissant son sujet à l’écriture : Chris Nolan apportait sa connaissance du polar/thriller/policer (tout en possédant un attrait certain pour la science-fiction : Le Prestige et Inception le prouvent ) et David S.Goyer sa connaissance encyclopédique des comics. Goyer est un piètre écrivain mais qui a de bonnes idées de base tout en ayant pour lui de savoir de quoi il parle. Mais il n’a jamais eu de liberté totale sur la trilogie consacrée à Batman : Chris Nolan et son frère Jonathan ont toujours passé une couche de polish voire carrément tout réécrit à eux deux.





Man Of Steel a été entièrement écrit par David S.Goyer d’après un synopsis développé par lui-même et Christopher Nolan. Que ce dernier n’ait pas rédigé le script est une double évidence : non seulement il n’est absolument pas coutumier de ce genre de super-héros mais surtout, il était en plein tournage de son Magnum Opus ( The dark knight rises, pour les deux au fond près du radiateur) lorsque le scénario était en phase d’écriture. Mais qu’il n’ait pas missionné son frère Jonathan de fignoler la chose reste un mystère insoluble pour moi. Un mystère qui aura une énorme conséquence : la bonne histoire mise au point par Nolan et Goyer se retrouve mal traitée , pas assez profonde ! À trop vouloir en faire, Goyer n'en fait pas assez !

Cette histoire d'ailleurs, qu'elle est telle ? Sur la lointaine Krypton, un enfant vient au monde. Son père, Jor-El est un scientifique éminent qui avertit le haut-conseil de sa planète que celle-ci est condamnée. Les Kryptoniens ont abusé de leur espace vital pour subvenir à leurs besoins et la planète est au bord de la destruction. Devant le refus du conseil de voir l'évidence, le Général Zod, un ami de Jor-El, tente un coup d'état et de subtiliser le Codex, l'essence de la culture de Krypton pour sauver la planète et éradiquer les lignées décadentes qu'il juge responsables de la situation critique que subit la planète. Devant ces méthodes, Jor-El se rebelle contre son ami , s'empare du Codex et le crypte dans les cellules de son fils, Kal-El, avant de l'envoyer au loin. Zod est capturé et envoyé avec ses séides dans la Zone Fantôme mais jure de retrouver Kal-El ! Krypton se désagrège. Dans l'espace, un petit vaisseau s'engouffre dans notre système solaire et fonce vers la Terre,porteur d'un chant d'espoir pour un peuple en attente d'un miracle...





Je n’ai jamais caché que je distingue parfaitement l’œuvre d’origine et son adaptation cinématographique, jugeant les deux comme deux choses bien séparées. L’adaptation doit conserver les bases du livre qu’elle transpose, cela est la seule règle ( sinon, à quoi bon adapter ? ).
Mais ici , toutes les bases ne seront pas conservées ! Et un ajout de traumatisme fondateur ( dont Superman est exempt , contrairement à presque tous les autres super-héros ) est carrément ajouté !
Sans parler de cette envie un peu étrange de rendre Superman encore plus exceptionnel que l’exceptionnel en complexifiant la raison de son envoi vers la Terre par ses parents biologiques.



Alors oui, les fans sentiront que Goyer a lu pas mal de comics Superman ( on pense à Secret Origins, Birthright ou encore Pour Demain lors d’un passage avec un cureton ) mais avoir une connaissance des comics ne fait pas de vous un grand auteur, sinon j’aurai déjà décroché le Pullitzer !







Des problèmes d’enchaînements flagrants , une succession d'événements bien trop rapides (que Zack Snyder n’aurait pas dû laisser passer, soyons juste, il a aussi une part de responsabilité ! Mais on se demande pourquoi Clark a entamé un voyage. Pour faire le parallèle avec Batman Begins ?Comment a-t-il été mis au courant de certaines découvertes, etc....tout ça est survolé voire pas du tout exploré ) et des dialogues affligeants qui auraient gagné à être retravaillés sont légions !
La force d’un bon dialogue c’est qu’il reflète, dans une conversation fluide, une idée. Mais pas que cette idée directrice serve juste de dialogue. Le tout est bancal et parfois sans âme. Idem pour la caractérisation des personnages, trop esquissée ! Superman devient un héros en 5 minutes «  Bienvenue, je suis le fantôme de Jor-El, ton père.Tu te nommes Kal-El. Tu viens de Krypton, voila un costume sans slip rouge, vas faire joujou maintenant ! » Alors certes, avec ses deux papas ( non, ce n'est pas ce que vous croyez ! ) qui ont été Robin des Bois, le sens moral est presque inné, mais quand même...
Tous les films de Snyder depuis Watchmen ont eu droit à une version longue, j'espère qu'il en sera de même pour celui-ci car il manque une bonne demi-heure.

Regardez dans le ciel..
C'est un oiseau ? C'est un avion ? C'est...
Non, c'est juste un mec avec des collants !


Finis les longs mois d’apprentissage pour devenir LE messie/sauveur/plus grand héros de la Terre (biffez la mention inutile) . Clark Kent devient juste un mec déguisé en Superman avec les mêmes pouvoirs. Finies les grandes déclarations sur l’humanité, sur la place qu’il peut prendre, sur ses aptitudes et ses responsabilités en tant que surhomme et en tant qu’étranger à ce monde, tout cela est expédié en 5 phrases et puis basta !
Ce qui induit de facto un effet pervers : Superman sauve tout le monde habituellement ! Ici, les morts vont se compter par milliers !!!!! Certes, ce n'est jamais cash, vous ne voyez pas les gens mourir mais vous assistez à presque 15 "11 septembre" en un un quart d'heure de temps.Pour paraphraser Balavoine : « Où est le sauveur ?».





Goyer, tel un bulldozer Caterpillar devant un village palestinien, détruit des fondations essentielles au personnage! Alors oui, le plus gros est là mais le mal est fait. Le fait que même la plus grosse des séquences d’action se déroule à Smallville et non à Métropolis est symptomatique ! Pire, Superman devient ici la caricature que le monde voyait en lui : un pur produit de la culture américaine quand seul son côté Clark Kent l'était. Du messie universel vendu par Singer, nous passons au défenseur de l'Amérique Républicaine.

Et je ne vous dévoilerai pas les dessous de sa relation avec Lois Lane, mais cela va en faire jaser plus d’un ( voire faire faire quelques arrêts cardiaques à d’autres) ,même si cela me convient personnellement , ni sur une scène choquante en fin de film et qui ne devrait être accolée à aucun super-héros et encore moins à Superman ! Et sur ce point je n'en démordrais pas !



Ce qui aurait dû être Superman Begins évite de justesse de se transforme en Smallville, le film !  Car plusieurs choses viennent quand même sauver un script aux dialogues assez maladroits et à la caractérisation des personnages souvent survolée.
Tout d’abord, l’histoire concoctée par Nolan et Goyer est bonne ! Les enjeux sont énormes, tant pour la première partie sur Krypton que pour l’action sur Terre ! Il se passe beaucoup de choses, il y a toujours un élément pour relancer la machine ! Le revers de la médaille c’est qu’un sentiment de répétition peut se faire sentir lors du dernier acte où l’impression d’aller-retour entre la Terre et le vaisseau alien en orbite est palpable !

Ensuite, il y a cette envie de trouver une alternative à la Kryptonite pour rendre Kal-El vulnérable. Alors certes, c’est un peu bancal mais on sent l’envie d’aller au-delà des clichés habituels pour ce tour-ci et rien n’empêche d’introduire la pierre verte plus tard lors d’une suite quasi assurée.
L’antagoniste, le Général Zod, est loin d’être manichéen. Ses méthodes de tyran sanguinaire jusqu'au-boutiste illustrent l’adage que l’enfer est pavé de bonnes intentions. Et l’enfer qu’il a prévu est tout bonnement apocalyptique et destructeur. Il profite sans doute du plus gros travail de caractérisation du film mais reste quand même plombé par les dialogues de Goyer qui ne sont clairement pas du Shakespeare.

Merde, car c’était LE personnage qui le méritait le plus ! Il est par contre amusant de constater que son ambition est la même que celle de Lex Luthor dans Superman Returns ( les moyens et les fins voulues étant totalement différents par contre).

Enfin, il y a cette absence totale d'incohérences dans le scénario.Mais on pourra toujours se poser des questions sur quelques agissements qui n'auraient sans doute pas dû êtres prioritaires pour le grand bleu en cape rouge.



Les autres bonnes choses proviennent de Zack Snyder, le réalisateur.
L’homme a toujours eu un sens de l’image assez fascinant et un goût immodéré pour le ralenti. Et ce goût du ralenti n’apparait jamais dans ce film, il vient d’évacuer le seul reproche visuel que ces détracteurs lui faisaient, bravo Zack !
Tous les trucs pour magnifier les corps ou l’action, Zack Snyder les connaît ! Reprenez 300, Watchmen, Sucker Punch ! Il a le cadrage dans le sang ( sa mère était photographe d’art et prof de peinture, il a nagé dans le pictural dès sa tendre enfance ) et le regard iconique. Il aime l’esthétisme, harmoniser les couleurs et cadrer pour que son image ait du sens. Ce que le script pêche à rendre divin et messianique, Snyder le réussit par l’image !

Un panthéon et un Dieu absolu en son sein , ça vous dit quelque chose ou faut que je développe ?  


Des surhommes avec une cape rouge ? Je dois vraiment détailler la thématique visuelle ou ça va ?

Dès le début du film, lors de l’apparition des logos, le ton pictural est donné. C’est beau, c’est neuf, c’est une nouvelle approche qui va plus loin que le simple changement de couleur du filtre que d’autres réalisateurs avaient tenté avant lui ( on se souvient du filtre vert pour la trilogie Matrix, le gris et bleu foncé de Nolan sur sa trilogie Gothamite,etc... ) et se rapproche d’un David Fincher jouant avec les logos lors de l’ouverture de Benjamin Button.
Ensuite, l’action et le montage sont au diapason : chacun est bien pensés et bien exécuté. Quitte à avoir un script faiblard, autant miser à fond sur la forme ( ce que Whedon n’a pas fait sur Avengers quoi !! ) ; et la forme est formidable.

 Les capacités de Superman et de ses ennemis sont à la fois respectueuses de ce que les comics et les films ont déjà montré mais sont aussi réinventées ( encore une fois, cette envie de proposer du neuf ! ) : les rayons calorifiques de Superman sont massifs, la super-vitesse est repensée : là où , dans le passé, les scènes se déroulaient au ralenti en montrant  Superman avoir une vitesse qui semblait normale voire très rapide, Snyder opte pour une scène montée à vitesse normale. L’effet est que Superman et ses adversaires atteignent une vélocité telle que l'on a l’impression que la rétine n’arrive pas à suivre totalement leurs déplacements. Ils vont d’un point A à un point C et notre œil a du mal à distinguer le passage par le point B !




Enfin, la force de frappe des protagonistes est immense, les dégâts qu’ils occasionnent font passer les astéroïdes d’Armageddon de Michael Bay pour de la pisse de chat ! Vous n’avez jamais vu des dieux en action sur grand écran avant ce film ! Impossible de prendre en défaut la mise en image, elle est sublime.
Les effets spéciaux sont réussis à un point pas croyable.
On sent où est passé l'argent du budget, chaque penny aura été dépensé pour quelque chose ! Mieux, ils font un bras d'honneur total à ce que Marvel Studios proposent en face ( Avengers profitaient des grosses pointures ILM et Weta Digital certes, mais Marvel Studios marchent à l'économie et ça ne pardonne pas : les grosses pointures ont besoin de temps et d'argent pour en mettre plein la vue ).
Et vous savez quoi ? Ils font un gros fuck en utilisant la même boîte d'effets spéciaux, Weta Digital ! Parce qu'eux ont allongé les billets, parce qu'eux ont pris leur temps pour proposer un produit commercial qu'ils comptent bien rentabiliser un maximum certes mais dont le but n'était pas QUE de faire du pognon en arnaquant les gogos et en se foutant ouvertement de leur gueule ( encore une fois, Avengers !!!! )

On n'avait plus vu une telle générosité graphique  et d'action dans un film de Super-héros depuis le Spider-man 3 de Sam Raimi (dernier film à avoir pris le sujet de la représentation des capacités surhumaines au sérieux) !!
Et Superman n'utilise pas tous ses pouvoirs dans ce film, cela laisse présager de belles images dans les suites!

Le production design est lui aussi très avenant et novateur par rapports aux anciens films , anciennes séries et  les comics qu'ils soient vieux ou plus récents.Il faut dire qu'on retrouve à ce poste Alex McDowell, qui avait officié sur Minority Report ou encore le culte Fight Club !





Les costumes sont de James Acheson ( la trilogie Spider-Man de Sam Raimi, Daredevil) et pour la première fois, Snyder change de directeur photo, passant de Larry Fong à Amir Mokri qui avait aidé Michael Bay a détruire Chicago dans  Transformers : Dark Side of the Moon. Savoir s'entourer des bons talents au bon moment et les exploiter comme il faut est un signe d'intelligence et de goût mes petits poussins!






Mais Zack Snyder a des soucis dans sa direction d’acteur. Si les pointures que sont Russel Crowe et Kevin Costner ( et ça fait plaisir de le revoir lui, il semble parti pour se construire une seconde carrière en second rôle de luxe) arrivent à faire passer les sentiments  et les émotions justes malgré des lignes de dialogues bancales, il n’en va pas de même pour d’autres acteurs.

À commencer par Diane Lane qui semble souvent jouer Martha Kent comme si elle était déconnectée de la réalité,là encore les dialogues pas toujours justes viennent troubler la performance.  Amy Adams ( habituée de se prendre des coups kryptoniens, sa carrière a commencé dans la première saison de Smallville, si si ) campe une Lois Lane certes casse-cou et aventureuse mais n’essaye pas d’aller plus loin que son script (bien qu'elle soit enfin représentée comme LA journaliste qu'elle devrait être et qu'on nous vend depuis des années dans les comics) ; idem , et là c’est plus grave, qu’Henry Cavill dans le rôle titre ! Il a la carrure, il a le talent mais il exploite plus l'une que l’autre ! C’est un peu ça pour tous les personnages positifs à l’exception de Laurence Fishburne qui incarne un Perry White affirmé, volontaire et très humain.




Amy Adams, il y a 12 ans , dans la première saison de Smallville. Mauvais maquillage, mauvais effet spécial, mauvaise série.

Si les adversaires de Superman sont presque tous sans saveur ( car à peine existent-ils dans le film), il faut saluer Michael Shannon en Zod et Antje Traue en Faora. Tous deux arrivent à donner à leur personnage impitoyable un côté profondément marqué par la disparition de Krypton, planète qu’ils ont tenté de sauver (là encore dans un schéma de l’enfer pavé de bonnes intentions mais on ne peut nier leur attachement à leur planète natale et à leur culture ) tout en étant dépourvu de sens moral et éthique.



Faora, la femme totale selon Snyder ? Spartiate comma la Reine Gorgo de 300, gracile et agile comme le Spectre Soyeux de Watchmen, redoutable comme la Babydoll de Sucker Punch



Néanmoins, malgré des qualités graphiques évidentes, Man Of Steel, c'est malheureusement une promesse brisée.
Depuis la diffusion des premiers extraits au Comicon (une convention articulée autour des comics et de la culture populaire ) jusqu'aux toutes dernières bandes-annonces, un aspect visuel avait été mis en avant : l'aspect contemplatif, similaire à celui du cinéaste Terrence Malick ( La Ligne Rouge, Le nouveau Monde, Tree of Life,...).

Des images naturalistes et poétiques, censées représenter la vision du monde que Kal-El pouvait avoir, comme si ses sens et ses origines lui permettaient de percevoir ce que nous avons perdu l'habitude de constater : le monde est beau.
Jamais, cet aspect n'est abordé dans le film, ces images sont fugaces et ne servent qu'à placer un contexte psycho-géographique rapide. Cela rejoint le manque de profondeur flagrant du film.Amère déconvenue car cette approche avait été confirmée lors du Comicon par le réalisateur et les acteurs.Alors, est-ce gênant pour le film ? En tant que tel , non ! Mais à nous vendre le film parfait, le spectateur (moi le premier) risque la déconvenue totale. Il m'a fallu une seconde vision pour que les qualités l'emportent sur les défauts, je dois l'admettre.

Enfin, notons que Zack Snyder aime glisser des petites références à son grand succès, 300, dans ses films. On se souvient de l'appartement 3001 d'Eddy Blake dans Watchmen qui perdait , le temps d'un long plan, son 1 final. Ici, Snyder nomme l'équipe de foot de Smalville d'un nom emblématique. L'image suivante parle d'elle-même.



Un mot sur la patte Nolan maintenant.
Elle se sent en de petits points, le film étant clairement un film de Zack Snyder dans sa réalisation voire même dans l’un des thèmes récurrents de Snyder , à savoir un petit groupe résistant à des envahisseurs/tortionnaires mieux équipés, plus nombreux et niant la valeur de l’individu : les critiques trouvant son cinéma fascistes ou machistes devraient y penser à deux fois avant de dire des conneries, ça feraient du bien à tout le monde.
On retrouve une structure en flash-backs proche de celle de Batman Begins et un casting de choix tant dans les premiers rôles que les seconds ( souvent composés de gueules bien connues et parfois emblématiques).Cependant, cette structure en flash-back aurait ici gagnée à suivre le modèle de son aîné et ne pas s'étendre sur tout le film car elle aurait permis de bien mieux cerner Superman.Encore une fois, un mauvais traitement met à mal la caractérisation du personnage alors que la matière est là , ça serait de la mauvaise foi de dire le contraire.


Christopher Nolan à gauche et Zack Snyder à droite.


Enfin, notons que Nolan a imposé son compositeur fétiche, Hans Zimmer en lieu et place de Tyler Bates qui avait signé toutes les b.o’s des précédents films de Zack Snyder. Zimmer offre ici une musique qui porte sa patte à plein nez. Enfin, ses pattes ! Outre son approche moderne et actuelle, Zimmer revient à son amour des synthés pour offrir une ambiance extra-terrestre mais aussi son amour du rock ; une guitare électrique venant prêter main forte à son orchestre, comme lors de ses moments de bravoures des années 90’s. Il a encore eu les mains libres et il s’est amusé pour le plus grand plaisir de nos oreilles.



Man of Steel est donc une déception scénaristique paradoxalement doublée d’un plaisir de voir défiler des images magnifiques
La mise en forme absolue et bluffante arrive à le situer au-delà de le mêlée puante de la plupart des films concurrents estampillés Marvel Studios ( sauvons Iron-Man 3 et surtout le très bon Captain America ) . Celle-ci peut sembler compensé un manque de fond, hors le fond est bel et bien là mais le script avait du mal à le mettre en avant, ce qui peut donner la première impression d'assister à un film bâtard avec le cul entre deux sièges de cinéma.

La supériorité du traitement de Batman sur le traitement de Superman !
En attendant un éventuel ex æquo grâce aux suites prévues ?