mercredi 21 mars 2012

A princess of Mars


La science-fiction est plurielle. Née on ne sait trop quand, je vais prendre le risque de la remettre en contexte temporelle vers la moitié du XIXme siècle avec la parution de Frankenstein de Mary Shelley (relisez ou revoyez les films, ça ressemble à du fantastique mais ça n'en est absolument pas). Voila posée "une" date de naissance. Hors un concept c'est comme un organisme : ça évolue. 

Étape par étape, le genre s'est construit ou plutôt s'est fait construire par divers auteurs. Citons H.G Wells bien entendu ( La machine à explorer le temps, L'île du Dr. Moreau, La guerre des mondes, etc…) ou Jules Verne. Quel est le point commun de leurs écrits les plus célèbres ? Ils appartiennent au genre dit de la science-fiction. Et pourtant les thèmes abordés par chaque histoire ne sauraient être plus différents: voyage dans le temps, invasion martienne, voyage spatial vers la lune, exploration des fonds marins quand le sous-marin n'était qu'une idée folle, etc…et de nos jours elle aborde les dérives de la génétique, de l'über-capitalisme, de la guerre pour le contrôle du net ( relisez Neuromancien à ce sujet : un roman qui décrit la lutte pour le contrôle d'internet, écrit en 1984 quand internet n'existait même pas ! ).

La science-fiction est plurielle, c'est une notion évidente de nos jours, tellement évidente et enracinée dans nos esprits qu'on ne prête même plus attention à ce fait. Mais cette pluralité s'est acquise sur la durée, il a fallu du temps et des ouvrages fondateurs pour en arriver là.

Le cycle de Mars, d'Edgar Rice Burroughs est de ceux-là. Entamé en 1912, il allait inventer le planet opera ( popularisé en 2009 par Avatar) et poser des bases pour une quantité colossale de récits à venir ( Avatar donc, mais aussi Superman, Star Wars).  Pourtant, il n'a jamais été adapté au cinéma ( ce n'est pas faute d'avoir essayé pourtant, depuis les années 30 le projet est dans les tiroirs des studios). Voir "John Carter " débarquer dans les salles, c'est voir un retour aux sources. Mais ce retour aux sources va devoir payer un prix fort  car en arrivant après tous les films qu'il a inspirés, il risque bien de souffrir d'un effet de comparaison inverse : pour le public, le copieur c'est " John Carter " ! J'en veux pour preuve l'affluences de citations tirées de divers journaux ( télévisés comme ceux de la presse écrite) qui trouvent divertissant  "ce film inspiré de Star Wars et d'Avatar". Cruelle ironie quand, en 1976, George Lucas déclarait vouloir faire avec Star Wars son " John Carter "( et son "Flash Gordon", autre grande influence de Lucas).  Que le public ne connaisse pas l'origine de John Carter semble soudain logique quand les journalistes eux-mêmes sont des incapables qui relaient de mauvaises informations.

John Carter est un soldat ayant fait la guerre de sécession dans le camp Sudiste. Alors que l'armée cherche à le réintégrer, lui ne rêve que de faire enregistrer sa mine d'or et vivre loin de tout. Acculé dans une grotte, Carter va faire une rencontre dangereuse qui va le conduire vers une planète éloignée, deux nations en guerre, une princesse en péril et un tout un tas d'emmerdes ! Oui, j'avais prévenu que ça avait bien servi d'influence !

Andrew Stanton, le réalisateur, est une pointure de chez Pixar. On lui doit "Le monde de Némo " et " Wall-e".  Et tout comme son collègue Brad Bird, parti réalisé Mission : Impossible – Ghost Protocol , il a passé le cap de la réalisation live.

Moins à l'aise que Bird ( le film est un brin moins fluide que celui de son collègue ), Stanton ne livre pourtant pas une œuvre indigne, loin de là. Mais le propos reste désuet, un peu old fashion car tentant de coller aussi bien à la modernité de notre époque qu'au texte d'origine. Hors, de nos jours, j'ose l'affirmer, certains côté old fashion sont vraiment cul-cul, particulièrement quand il s'agit de parler de sentiments ( amoureux, familiaux, etc…). Mais à bien y regarder, ces sentiments bien cul-cul sont au maximum 4 et durent chacun maximum 30 secondes. Bref 2 minutes au total sur 2h12 de film, ce n'est pas si terrible, mais ça peut vous faire sortir du film. Ce qui serait dommage ( mais le fautif c'est celui qui a laissé imprimé le scénario en l'état).




L'autre inconvénient c'est l'ambiance de la planète : rocailleuse, poussiéreuse. Vu tout ce que l'on sait sur Mars de nos jours, il est impossible de la représenter comme on veut où de prendre des libertés quand le texte d'origine le permet. Et un tel désert est fort peu attrayant pour l'œil. Pandora dans Avatar est bien plus belle. Reste que les différents peuples et leur religion sont intéressants. On distingue 3 races dans le film :les tharks ( martiens verts de 2m50 de haut possédant 6 membres ), les martiens rouges ( humanoïdes) et les therns ( humanoïdes à la peau laiteuse et doté d'une technologie bien en avance sur celle des martiens rouges). Les therns organisent à leur profit une guerre entre deux factions de martiens rouges . Et lors d'une longue conversation, leur but est exposé. Et il rappelle foutrement une situation bien connue et qui a échappé aux regards de Disney qui ne l'aurait pas laissé passer si ça n'avait pas été de la SF ( et donc imperméable à presque tous les patrons et exécutifs des studios ). On a jamais vu un vilain comme ça au cinéma. Par contre dans la vraie vie, il y en  a plein en ce moment ! La SF est prophétique et révélatrice !



Du sable, du sable et encore du sable. Tatooine, la planète des Skywalker, à côté ressemble à...bah ça ressemble à rien autant de sable !

John Carter est une grande fresque guerrière, romantique, philosophique sur la transformation d'un homme égoïste en héros d'un peuple qui n'est pas le sien. C'est aussi un sacré divertissement, certes conçu pour la jeunesse, mais qui mène son spectateur durant 2h12 sans l'ennuyer. Un rythme plus soutenu que celui du dernier Star Trek fait passer presque toutes les pilules ( y compris les incohérences inhérentes à ce genre de divertissement) et ne masque pas les idées de cinéma qui émaillent le film ( comme cette scène de bataille montée en alterné avec une séquence bien plus intimiste. Le résultat est garanti 100% couillu et efficace). Dommage que la musique de Michael Giacchino ( compositeur de J.J Abrams, mais aussi de Brad Bird) n'atteigne pas les sommets de Star Trek. Alors oui, on chipotera sur le fait que dans les romans, vu la chaleur sur Mars, presque tout le monde vit à poil ! Mais bon, je suis sûr qu'une parodie porno verra le jour et ne sera fidèle que sur ce point précis !

Allez, ne me dites pas que vous n'avez pas envie de la voir comme le roman la décrit...c'est à dire sans sa robe héhé ( oups, je suis passé en mode " pervers pépère " moi ).

Le design de production par contre est d'un haut niveau : les décors, les costumes, les véhicules...tout est beau ! Du travail d'orfèvre, mais pouvait-on vraiment en douter quand un as de Pixar est à barre ? On regrettera cependant que les martiens verts, race guerrière, ait un look si lisse. 







Pour la petite histoire, le film s'apprête sans doute à être un bide historique. Pas par son manque de qualité mais bien par l'incompétence du service marketing de Disney qui a salopé le travail. La responsable du département ( qui avait réussi à vendre la saga Pirates des Caraïbes) n'aimait pas John Carter et l'a bien montré…elle a été virée en février. Trop Tard pour rattraper le coup en salle. La sortie DVD et Blu-ray offrira peut-être une seconde chance au film !

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