samedi 10 octobre 2015

Le blues de l'Araignée.

Le scénariste Jeph Loeb et le dessinateur Tim Sale sont les auteurs de trois classiques "batmaniens" : A long Halloween, Dark Victory et Catwoman: when in Rome.  Des récits prenant place dans le passé du héros gothamite alors qu'il commençait tout juste à se faire une place dans la cité du vice. Des histoires sombres et réalistes dans leur aspect mafia contre police et un peu naïves dans l'approche des menaces plus exotiques. Mais jamais niaises. Un équilibre subtil et délicat digne d'équilibristes chevronnés. Du grand art.


Quelques années plus tard, Marvel propose à nos deux larrons d'appliquer la recette sur quelques héros de chez eux. Cela donner Daredevil : Yellow, Hulk : Grey et Spider-man :Blue (en attendant que sorte enfin Captain America : White ).

Peter Parker.
Le garçon mordu par une araignée radioactive qui lui a donné des pouvoirs surhumains.
Et une vie compliquée car quand on a des grands pouvoirs, on vous file aussi des grandes responsabilités.  Il n'est guère aisé de construire une vie quand l'appel du devoir se fait sentir, alors quand on plus on s'appelle Peter Parker et que vous avez la poisse de naissance… Et pourtant, Peter , à l'époque de l'histoire avant que ça ne soit effacé par cet éditeur malfaisant de Joe Quesada, est marié à Mary-Jane Watson.

Et si ce mariage a été rendu possible, c'est parce que Peter Parker…est sorti avec Gwen Stacy.
Gwen, la fille inaccessible lui est tombée dans les bras. Mais ça n'a pas été une mince affaire.
Car au moment où elle lui montre de l'intérêt, Peter voit catastrphes sur catastrophes se produire : le Rhino s'échappe, le Vautour fait des siennes, Kraven le chasseur débarque et Mary-Jane Watson lui est présentée et lui fait un rentre dedans pas possible.



Jeph Loeb alterne une narration en voix-off pleine de douceur et de nostalgie , c'est la voix de Peter qui se rappelle ce temps-là : nous sommes à la St-Valentin et il enregistre des messages sur cassettes que Gwen n'entendra jamais. Les fans de comics le savent (et les spectateurs de cinéma aussi depuis l'an dernier ) : Gwen est morte après que le Bouffon Vert l'ai jetée depuis les hauteurs de New-York. Le drame, c'est que c'est probablement Peter qui, en lançant sa toile et en rattrapant Gwen, l'ai en fait tuée. Et sous le texte, les images de Sale nous racontent une histoire très colorée, qui sent bon les facilités et les naïvetés des années 60.

Encore une fois, les deux jouent les équilibristes mais, alors que le drame de Batman se situe dans son enfance, le drame des héros Marvel se conjugue souvent autant au passé qu'au présent.  Si conquérir Gwen est un peu présenté comme une comédie romantique où le héros a le monde contre lui, la fin, douce amère nous explique en quoi Mary-Jane n'est pas un second choix de luxe pour Peter. C'est une évolution logique pour MJ et lui. Parce que la mort de Gwen n'a pas été qu'une perte pour Peter : elle avait aussi une amie rousse follement branchée.



En elle-même, cette histoire reste anecdotique et nécessite d'être un fan de super-héros pour lui trouver un intérêt. Mais, comme je le disais, la narration de Peter sort du lot : rarement, un auteur aura si bien perçu ce qu'est le drame de Peter Parker. Et aura réussi à nous le faire ressentir.
C'est un drame humain considérable, un tournant radical dans l'histoire des comics ( la mort de Gwen mettra fin à l'âge de l'innocence).  La vie de Peter Parker est un mélodrame comique quasi permanent. Et là où certains auteurs en jouent plus ou moins bien , Jeph Loeb est parvenu à nous le faire ressentir pleinement. On sort de cette lecture avec la larme à l'œil, rien que parce que les bons mots ont été utilisés. Pas parce que le choc des images nous ébranle. Non, parce que les phrases nous submergent et nous emportent.

Ce n'est pas pour rien qu'aucune image super-héroïque n'est présente dans cette critique.



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