mercredi 4 septembre 2013

Batman : Vengeance Oblige !

DC Comics a lancé la collection Earth One ( Terre-1) qui consiste a reprendre depuis le début un super-héros dans des histoires déconnectées de la continuité et dans un format bien loin des comics puisqu’il s’agit de grands albums types européens avec une pagination importante, bref des graphic novels comme le veut l’expression. Après Superman en Juin (pile à temps pour la sortie de Man of Steel dis donc, le hasard fait bien les choses ), c’est au tour de l’homme chauve-souris de profiter de l’initiative.
C’est Geoff Johns qui se charge d’écrire et c’est Gary Frank qui assure (comme une bête) les dessins.

Thomas Wayne, héritier d’une des familles ayant fondé Gotham City et propriétaire d’une compagnie d’ingénierie médicale, se présente à la mairie de la ville. Sa femme, Martha Wayne-Arkham est sa directrice de campagne. Ayant reçu des menaces de mort, Thomas, pour rassure sa chère et tendre, rappelle l’un de ses amis de l’armée, Alfred Pennyworth. Le soir de l’arrivée d’Alfred, la famille Wayne cède à l’une de ses habitudes, une sortie en famille et en famille seulement, au cinéma. En sortant de la salle, la famille Wayne est assassinée par un voyou sous les yeux de leur fils unique : Bruce. Convaincu que l’adversaire politique de son père, Oswald « Le Pingouin » Cobblepot est derrière cet acte odieux, Bruce décide de se venger…

Il y a , à mon sens, une différence entre une réinterprétation et une réécriture. La réinterprétation conservera les bases supposées immuables et modernisera la vision des choses ou trouvera un angle inédit. La réécriture, elle, passera un coup de gomme sur certains aspects pour que l’écrivain fasse ce qu’il veut sans être embêté par des éléments qui nuirait à son inspiration. Personnellement, j’éprouve plus de respect pour la personne livrant une réinterprétation inédite que pour un auteur qui réécrit pour s’assurer une certaine facilité dans son travail. Malheureusement, Geoff Johns réécrit.

Johns, dont j’apprécie souvent le travail, que ce soit sur l’univers de Green Lantern  ou encore le récent Flahspoint , ne livre pas une mauvaise histoire. Mais il est surtout un auteur de blockbusters de bande-dessinée  peu subtil. Attaquons d’abord ce qui ne va pas avant de passer aux qualités de l’ensemble !

1° L’auteur change l’angle d’attaque de Bruce Wayne : la vengeance ! Batman n’agit pas par vengeance, ce n’est pas un justicier qui cherche à se sentir mieux en tabassant voire en assassinant les gens.

2° Le Batman présenté ici se lance dans sa quête en n’étant pas assez préparé ! Son entrainement physique et mental est à des lieues de ce qui a forgé Batman : que ce soit sous l’aile de Frank Miller, de Scott Snyder ou encore de Christopher Nolan dans les récents films, Bruce parcourt le monde pour apprendre comment combattre le crime. Johns nous livre un Bruce resté sur place et formé par un soldat efficace mais vieillissant : Alfred ! Faire d’Alfred un vétéran n’est pas une mauvaise idée en soi par contre, il a souvent été insinué que le majordome engagé par Thomas Wayne avait un passé chargé.

3° Et là ça risque d’en choquer plus d’un : James Gordon est un pleutre, un pourfendeur de nano-dangers. Un tel coup dans la légende, c’est très out of character. Trop !
Il y a des bases à respecter lorsqu’on s’attaque à un mythe et tant pis si elles sont trop restrictives pour l’imagination de l’auteur. S’il ne sait pas faire avec des thèmes imposés, qu’il laisse la place à un autre !

4° Geoff Johns a semble-t-il été puisé son inspiration autant dans les récits des comics mais aussi dans les films centrés sur le croisé masqué, ceux de Burton et de Nolan. Ce n’est pas un défaut en soit que de se baser sur ce qui a été fait concernant les diverses versions du point de départ de Bruce Wayne, presque chaque auteur qui tente l’exercice a emmagasiné les travaux précédents, c’est la preuve de l’intérêt qu’ils portent au personnage.
Ainsi, Le Pingouin maire de Gotham est une idée apparue dans Batman Returns (Batman : le défi ). Gotham est une ville pourrie, à la Police corrompue. Que le maire soit un être aussi abject que Le Pingouin est un passage de palier supérieur mais logique. Le souci, c’est ce qu’il a pris à Nolan.
Christopher Nolan utilise une imagerie réaliste pour raconter une histoire totalement irréaliste. Johns lui, passe à côté de cet aspect et tente d’être super-réaliste (au détriment du côté super-héros du coup) et va même jusqu’à emprunter quelques lignes de dialogues du film Batman Begins !




Et enfin, difficile de penser que Bruce Wayne est sain d’esprit. Je suis le premier à admettre que cet homme a un problème , une chauve-souris au plafond…et une grosse ! En faire le descendant, par sa mère, d’une famille d’azimutés est un procédé tellement peu subtil que j’hésite encore entre la consternation et la franche rigolade.

Néanmoins, tout ceci est disséminé dans un récit assez bien foutu et plaisant qui ne rentrera pas dans les annales pour avoir révolutionné le genre mais qui se laisse lire. L’intrigue prend parfois des détours inattendus (quoique très hard et sombre, comme ce serial-killer homme de main) et apportre quelques idées intéressantes (mais là encore manquant de subtilité) comme les jumeaux Dent : Harvey et Jessica. Le Futur double-face de cet univers sera peut-être un binôme ? On passera sur certaines facilités amenant Batman a interprété des indices qui auraient pu le mener n’importe où si on y réfléchit deux secondes.

Les dessins de Gary Frank sont très bons et dynamiques. Assez réalistes, ce qui est une bonne chose pour décrire l’état des rues de Gotham, ils bénéficient du talent du dessinateur en matière de story-telling, ce qui rend l’ensemble lisible facilement sans crainte de se perdre dans le sens de lecture des cases.
Batman Terre-Un est au final un bon petit moment de lecture à défaut d’être un bon Batman. Ce n’est qu’à la condition de ne pas s’attendre à voir évoluer une copie du Batman que l’on connaît que les défauts ne vous feront pas sortir de la lecture cependant. Vous voila prévenus !

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