vendredi 3 mai 2013

L'homme de fer, l'homme à tout faire.


Changement de réalisateur pour la saga Iron-Man au cinéma. Adieu Jon Favreau, acteur comique de second plan recyclé de lui-même en réalisateur et bonjour Shane Black, réalisateur/scénariste du très bon Kiss Kiss Bang Bang (avec un certain Robert Downey Jr, tiens tiens ) en 2005, son premier film. Alors ce changement est-il salutaire ? Oui, indéniablement oui !

Kiss Kiss Bang Bang, c’était le film de la résurrection pour Robert Downey Jr. Celui qui lui a remis le pied à l’étrier après une traversée du désert monumentale. Souffrant de problèmes d’addictions, Downey a vu Hollywood lui tourné le dos. Il a repris sa vie en main grâce à des années d’efforts. Et Shane Black lui a offert de revivre sous les projecteurs ! Pourquoi aller rechercher un acteur tel que Robert Downey Jr pour son premier film ? Pour être certain de faire le buzz ? Pas si sûr non, car Shane Black lui-même revenait de l’enfer, ces deux là étaient fait pour se relancer mutuellement !


Car si son nom ne vous dit rien,les films qu’il a scénarisés vous sont connus et pas qu’un peu.  L’arme Fatale et L’arme fatale 2, c’est lui ! Avec son dosage presque parfait d’action violente, d’humour (souvent cynique) et d’introspection du héros, Black a crée un nouvel archétype dans le cinéma. Parce que sans Martin Riggs, pas de John McClane ( Die Hard ) voire même de Stanley Goodspeed ( Nicolas Cage dans The Rock ).

Shane Black est donc vite remarqué par les studios qui changent les règles. Très souvent, un studio achète un scénario à un prix raisonnable et le fait retravailler par d’autres auteurs pour arriver à un résultat (parfois très éloigné du script acheté) qui lui convienne. Black devient un chouchou illico presto, on achète ses scénarios lors d’enchères à des prix mirobolants. Le dernier Samaritain, Au revoir à Jamais et Last Action Hero le rendent riches. Mais ce succès, loin de lui monter à la tête, le rend dépressif. Et les crashs consécutifs de Last Action Hero et de Au revoir à Jamais en rajoutent une couche. 
Dès lors ( dans les années 90 ), Shane Black n’est plus sollicité pour écrire , il ne reçoit même plus de coups de fil pour Noël. Son «  trésor » de guerre lui permet de vivre plus ou moins correctement même s’il est parfois obligé de louer sa maison pour des tournages les mois où aucun royalties ne tombent. C’est petit à petit qu’il se relèvera. Et en 2005, Hollywood assiste à sa renaissance en compagnie d’un acteur génial !



Iron-Man 3 est son second film, en 8 ans.

Avant d’entamer la critique à proprement parler, j’aimerais définir quelques notions si vous le voulez bien !
Univers Marvel : Monde de BD remplis de super-héros qui existe depuis plus de 50 ans.



Ultimate Marvel : Monde de BD remplis de super-héros qui existe depuis plus de 10 ans. Il s’agit d’une remise à zéro des concepts les plus vendeurs de Marvel mais qui démarraient vierges de toute continuité trop lourde, pour que de nouveaux lecteurs se familiarisent avec les héros Marvel sans être dégoûtés de louper toutes les références. Cette réinterprétation est plus qu’un remake mis à niveau de l’époque puisqu’elle ne reproduisait pas toujours les mêmes schémas et jouait avec les connaissances supposées du lecteur.



Univers Marvel Studios au ciné : Monde de fiction cinématographique vieux de 5 ans ( Les X-Men et Spider-Man sont apparus avant mais les droits appartenaient aux studios Fox et Sony ) . Ce monde est une réinterprétation dans un autre média, une sorte de Ultimate Marvel Ciné qui se nourrirait des deux univers vendus dans les comics.



Fanboy : dévot presque sectaire qui aime les comics de façon religieuse et qui ne supporte pas qu’un détail même minime soit changé dans les réinterprétations cinés mais qui le prend avec le sourire et émerveillement quand il s’agit de la version Ultimate imprimée sur papier. 
Le fanboy est un troll des forums qui se croit légitime car il agit en bande semi-organisée. Et je préviens tout de suite : je refuse d’engager le débat avec des fanboys incapables de faires la différence entre comics et "art de la mise-en-scène" : laissez un commentaire à vos risques et périls.

Ces notions sont destinées aux néophytes qui vont voir les films sans connaître les comics ou le monde dangereux des forums du net , car elles reviendront dans cette critique.

Les USA subissent les assauts d’un terroriste qui se fait appeler le Mandarin ( Ben Kingsley). Ce dernier a lancé de multiples attaques contre des intérêts américains. Le Président a mis sur le coup War Machine (l’armure grise dans Iron-Man 2), rebaptisé Iron-Patriot et repeint aux couleurs du drapeau. Le pilote, James Rhodes (Don Cheadle) est un ami de Tony et lui fait savoir qu’Iron-Man n’est pas demandé, c’est une opération militaire et les super-héros sont priés de rester à l’écart . Mais quand un ami de Stark se trouve au mauvais endroit au mauvais moment, Tony, fou de rage, lance un défi au Mandarin, lui promettant de le tuer et de finir par lui donner son adresse personnelle. La réaction ne se fait pas attende, Stark est attaqué et supposé mort.




Avant toutes choses, sachez que ce film est en réalité plus une suite à Avengers (autant dire que ça part très mal donc ) qu’à Iron-Man 2. En effet, la dernière aventure de Tony Stark n’a pas eu lieu dans le dernier film centré uniquement sur ce héros. C’est donc dans ce film-ci que Tony Stark va devoir gérer les conséquences psychologiques des événements survenus à New-York où il a failli mourir lors d’une invasion alien bidon et indigne du cinéma bollywoodien  ( bollywood : le hollywood indien, cheap et kitsch même de nos jours ,alors que rien que grâce aux ventes en Inde, ce cinéma rapporte plus que le cinéma américain) ! 

Mais on peut se demander pourquoi il ne demandera pas l'aide de certaines de ses connaissances. Si dans les comics, chaque héros possède une galerie de vilains qui lui prennent du temps et donc l'empêche d'aller résoudre les soucis des autres, il n'en va pas de même dans cet univers de cinéma qui voit plus de héros dans les rues que de menaces ( ce qui laisse donc vachement plus de temps pour filer un coup de pouce aux copains!!!!).

Tony Stark nous compte des événements survenus en 2000 et nous précise que ceux-ci allaient donné naissance aux démons de sa vie future. Et c’est sur cet aspect que le film sera vraiment lancé. Les aventures en tant qu’Avengers ne concerneront pas l’intrigue principale mais bien la psyché de Stark : sa prise de conscience de l’existence des aliens, des dieux et autres joyeusetés trouble cette homme rationnel et scientifique ! Il ne dort plus et passe son temps d’insomnie à travailler sur ses armures, quitte à un peu laisser de côté sa petite amie. De 7 armures conçues sur 3 films, Stark passe dans cette quatrième aventure à…42 !



Malgré les changements de scénariste et de réalisateur, le film ne marque pas une coupure dans la saga. Shane Black ne se pose pas en conquérant cherchant à tout prix à marquer son territoire. Non, il se place dans la continuité de ce qui a été fait avant lui tout en cherchant à hausser le niveau, ça s’appelle le respect. Le respect pour le travail des autres et le respect pour le spectateur qui vient chercher ce qu'il avait aimé tout en espérant être surpris !
N’allez pas pour autant croire que les changements ne sont pas là, ils sont bien présents !

Dès l’ouverture du film, le ton est donné : AC/DC a disparu. Pas d’effet facile musicalement pour mettre dans l’ambiance, Black nous y plonge par le dialogue et les situations. 
En 5 minutes il a exposé le tempérament de Stark et posé les bases des problèmes qui viendront le tourmenter durant le film. L’un de ses problèmes étant le fameux virus EXTREMIS bien connus des lecteurs de comics. Le mode de fonctionnement diverge de son équivalent papier mais les bases restent les mêmes. On regrettera que ses effets changent d’intensité d’un individu à un autre. Idem pour le personnage du Mandarin : les fanboys vont hurler à la trahison et détesteront le film pour ce simple détails sans se soucier du reste du métrage. Hors, ceci est une adaptation. Une adaptation c’est la traduction d’une œuvre vers un autre type d’œuvre. Et TOUS les traducteurs du monde vous le confirmeront : traduire c’est trahir ! Mais est-ce vraiment une trahison et non un jeu ? Le spectateur lambda est vierge de toutes données sur Le Mandarin et le lecteur de comics croit tout savoir. En trahissant, Shane Black ne met-il pas tout le monde au même niveau ? Ne réussit-il pas à surprendre tout le monde ? La réponse est : oui ! 
Et c’est là le plus important ! Car il s’agit d’un film. Le cinéma est un média de masse et le film se doit de parler aux gens et non pas à une petite caste d’érudits qui veulent voir un comics sur grand écran. Bin lisez-en , au cinéma on projette des films ! 
Je n’en dirai pas plus, mais sachez que Ben Kingsley livre ici une prestation mémorable dans le rôle du Mandarin et l’on sent tout le grand plaisir qu’il a pris à être sur le plateau du tournage ( ce qui lui arrive rarement, il avoue lui-même juste encaisser le chèque quand le projet est mal engagé.), presque autant que dans le Hugo de Scorsese ! Il a le regard brillant de l'homme qui aime ce qu'il fait , et c'est comnunicatif !




La grande qualité d’Iron-Man 3 c’est d’avoir diminué drastiquement, voire même carrément gommé, la majeure partie des défauts d’Iron-Man premier du nom quand le second volet les avaient amplifiés au delà du bon sens. Premièrement, le scénario étant terminé AVANT le tournage du film, les acteurs ne peuvent ( ne doivent ) plus improviser en tentant de garder le cap du film. 
Black est avant tout un scénariste et donc protège son bébé de scénario. Robert Downey Jr ne doit donc plus en faire des caisses ni des tonnes (ni des tonnes de caisses) pour compenser la vacuité de certaines séquences (ne redoutez rien, il reste très expansif). 
Les répliques font mouches (à défauts d’être cultes ) et l’humour reste très présent mais sans phagocyter le film. Il est là, il y en a beaucoup mais encore une fois il ne s’agit pas de faire rire pour cacher le vide. Les personnages ont de la répartie et quand l’humour provient d’un élément qui ne fonctionne pas, cela relance la machine dramatique (un peu comme dans Mission :Impossible Ghost Protocol  quand le matériel déconne et que le corps accuse le kilométrage !Drôle sur le moment mais galère galère pour le héros ).

Le tout fait penser aux films des années 80 et du début des années 90 mais réalisé avec les moyens actuels. On retrouve certaines situations, comme celle de voir un mioche aider le héros ( sans que cela soit crispant…année 80 quoi ! ). On voit aussi que Shane Black utilise certains de ses gimmicks habituels : l’ambiance de Noël et un final dans un port ( Arme fatale 1 et 2 ), la destruction de l’imagerie Hollywoodienne ( qui était au centre de Last Action Hero et qui se focalise ici sur une séquence au Chinese Theater de L.A, haut lieu hollywoodien : google est votre ami pour en savoir plus, je vais pas toujours vous mâcher le boulot non plus ! ) ou alors la dynamique du buddy movie : le héros n’est jamais vraiment seul à agir. Martin Riggs avait Roger Murtaugh, Tony Stark, lui, changera de partenaire au fil du film et des péripéties.



L’une des incohérences flagrantes du scénario, à savoir une armure déchargée alors que la plaque thoracique de Stark est supposée alimenter ses armures, nous permet de mettre Tony au cœur de l’action mais en étant bien plus exposé ! Et là, il va devoir monter qu’il est un vrai génie capable de tirer parti de son environnement  pour s’en sortir et pas juste un type très intelligent en armure. Ce qui n’enlève rien au suspens ni au sens du spectaculaire, la fin étant un joli morceau de bravoure avec son ballet des armures.

Néanmoins, Iron-Man 3 n’est pas un chef-d’œuvre. Déjà parce qu’il revient de loin cinématographiquement parlant, ensuite, parce que Shane Black a beau être plein de bonnes intentions, ce  n’est que son second film et il n’a pas encore tout à fait la main : personne ne passe d’un bon polar noir à une grande machine de guerre (oui fans de comics, il y a un jeu de mot) comme ça à moins de savoir s’entourer comme il faut ( genre Sam Mendes sur Skyfall ) et le studio ne lui a clairement pas laisser faire sur ce coup-là. Il admettait lui-même en interview qu’il y avait 100 bonnes idées à exploiter pour ce film et que Disney en avait rejeté 25 et Kevin Feige, le big boss de Marvel Studios, en avait rejeté le même nombre également.  
Enfin, si le menace est plus originale dans son traitement du terrorisme que l’habituel  « Moyen-Orient dangereux et Américains tous vertueux », on a du mal de s’en faire pour les personnages même quand ceux-ci peuvent être sacrifiés (certains personnages sont interchangeables alors que Tony , Pepper et Rhodey ne risquent pas grand-chose). 

La musique de Brian Tyler assure le job mais ne restera pas dans les mémoires à la sortie de la salle. Tyler est le troisième compositeur consécutif sur la saga. Saga qui manque cruellement de cohérence musicale, hors la musique donne toujours un peu d’identité. Et si cette identité est mouvante…
Enfin, la 3D est un gadget qui ici ne sert strictement à rien mais qui a le bon goût de ne pas gâcher la luminosité des plans, ce qui est appréciable lors des séquences de nuit qui restent compréhensibles, ouf.




Pour faire court : Iron-Man 3 est un excellent pop-corn movie bien moins crispant que les deux premiers opus qui ne reposaient que sur Robert Downey Jr et l’esbroufe des images de synthèses (et un peu les formes avantageuses de Scarlett Johanson dans le second volet puisqu’à la moindre occasion le réalisateur faisait un gros plan sur le postérieur de la demoiselle ou sur son soutif, au choix.Cruelle régression pour une actrice qui ne misait pas tout sur son physique, mais je m’égare). 
Rythmé, drôle, agréable à l’œil et doté d’un casting solide en plus de l’habituelle Gwyneth Paltrow, nous avons Rebecca Hall et Guy Pearce (parfois en train de sur-jouer, il est vrai), qui arrive à cacher les incohérences minimes mais bien présentes.




Iron-Man 3 marque peut-être l’envie de Marvel d’aller vers autre chose que seulement exploiter son catalogue, en allant chercher des auteurs plus intéressants qu’intéressés ( Jon Favrau était un fan d’Iron-Man mais un piètre conteur, Black c’est l’inverse ). Petite incongruité, le film, d'une durée de 2H10, est 12 minutes plus long en Chine, certaines scènes avec des acteurs chinois ayant été tournées spécialement pour ce marché spécifique. Il est probable (mais pas certain) que ces séquences seront disponibles sur le Blu-ray du film qui devrait sortir fin août-début septembre.




En sachant que Robert Redford a accepté de jouer dans Captain America : the winter soldier qui sortira en 2014 parce qu’il avait apprécié le scénario qui n’est ni plus ni moins qu’un thriller d’espionnage politique mâtiné d’action, je me dis que je ne me trompe peut-être pas sur leurs intentions. 

1 commentaire:

Zaïtchick a dit…

Bon film, bien foutu. Une réserve pour les vilains qui manquent de personnalité (les pouvoirs et le visuel se répètent). Un choix audacieux concernant le Mandarin. A noter, la présence de Miguel Ferrer et une BO "palédourissienne" qui évoquent un précédent "homme de fer" au cinéma, Robocop.