mercredi 25 mai 2016

X-Men : Apocalypse now !

Deux ans après le retour de Bryan Singer aux commandes sur la franchise aux mutants adaptée du catalogue Marvel Comics, celui-ci nous revient pour l’Apocalypse (rien que ça) sobrement annoncée par une scène post-générique de Days of Future Past ( que ce soit dans la version cinéma ou la Rogue Cut, version longue du film et bien plus intéressante).
Avant de pleinement rentrer dans la fin du monde, petit (très petit) état des lieux.

"La mutation, c'est la clé de notre évolution.
C'est elle qui nous a mené de l'état de simple cellule à l'espèce dominante sur notre planète,
le processus est long et remonte à la nuit des temps, mais tous les deux ou trois cent mille ans, l'évolution fait un bond en avant..."

X-men est assurément, pour le meilleur et pour le pire, la franchise cinématographique qui aura réellement permis l’avènement du Super-héros comme modèle économique viable dans les salles obscures. Avant elle, les adaptations de comics centrées sur les super-héros existaient ( Superman de Richard Donner, Batman de Tim Burton ) mais ils ne s’agissaient là que de tentatives sporadiques de la part de gros studios.
Singer décide de traiter le sujet au premier degré sans parodier ou ridiculiser le concept du héros costumé.
Mieux, il se sert de la métaphore mutante (déjà présente dans les comics) pour bien faire passer les messages de tolérances envers la différence : Juif et Homosexuel, Singer semble bien placé pour aborder de tels sujets. Le cas fera école ( la trilogie Dark Knight de Christopher Nolan en est un bon exemple).
16 ans plus tard, la boîte de Pandore ouverte par Bryan Singer a fait émerger des dizaines de films, pour la plupart des succès publics ( voire le box office ) faute d’être forcément des succès critiques ( mais on connait la frilosité face aux films de genres de la critique européenne ) et , plus grave, faute d’être forcément des bons films : la tendance semble vouloir s’inverser mais tant que ça ne sera pas confirmé, il suffit de voir la filmographie de Marvel Studio : plus de purges infernales mises en boîte à la va-comme-je-te pousse (le concurrence fait des films sérieux ? Démarquons-nous en faisant des blagues débiles. Bravo…et le pire c’est que ça vent des billets de cinéma) que de films avec un propos et une cohérence filmique ( Les 3 « Captain », le 3éme Iron-Man , Increbible Hulk, Avengers 2 : c’est peu et aucun n’est exempt de défauts gênants). Passons aussi les lamentables reboots de Spider-Man commis par l’opportuniste hypocrite qu’est Marc Webb.
La franchise mutante n’est pas en reste puisque  X-Men The Last Stand et X-men origins : Wolverine sont voués aux gémonies des fans et des cinéphiles.
Le modèle est donc viable mais doit être affiné, toutes les mutations ne survivent pas mais toutes permettent de poser un constat et de voir quel chemin est le meilleur à prendre.  Les X-Men , à l’été 2000, ont lancé la mutation et il n’aura fallu que quelques années pour que le cinéma hollywoodien face un bond en avant…mais vers quoi ? Seul l’avenir nous le dira.








« Les mutants. Depuis que leur existence est connue, ils ont suscité la peur, la méfiance, voire la haine. Le débat divise la planète, les mutants représentent-ils le prochain stade de l’évolution ? Ou s'agit-il d'une nouvelle humanité parallèle, revendiquant sa part du monde ? Quoiqu'il en soit, c'est un fait historique, partager le monde n'a jamais été la vocation de l’homme. »

Si les films de super-héros sont des mutants, alors que sont les autres films ? Ouvrez des journaux, des magazines spécialisés ou simplement les réseaux sociaux. La haine farouche face à ce genre de films est palpable, l’on parle d’overdose à chaque nouveau film traitant un personnage issu d’une bande-dessinée américaine.  Au sein même de la communauté «  geek », des clans se forment : pro-Marvel , pro-DC, anti-comic book movie etc…
Les films descendus par le moyen de la comparaison à d’autres films plutôt que par des arguments ( dernier en date : « Civil War est un bon film car il est meilleur que Batman v Superman. »  Connerie abyssale, ça reviendrait à dire que Thor est un bon film car il est meilleur que Alone in the Dark de Uwe Boll. Nota bene : il ne s’agit pas ici de dire que le dernier film de Zack Snyder est mauvais ou digne d’un Uwe Boll , la critique de Batman v Superman se fera cet été, sur base de la version blu-ray de 3 heures) sont légions.
Tout est bon pour fragmenter, ce qu’on appellera vulgairement les geeks ,entre eux, les combats sont intestins et les débats parfois violents.

J’aime à penser que ce modeste blog est une preuve que l’on peut apprécier DC, Marvel et les autres pans de la pop-culture ( John Carter, Star Wars, Avatar, etc…) sur base non pas de parti-pris idéologique mais sur base d’arguments filmiques (et donc de descendre , pour les mêmes raisons, ce que l’on pensait aimer en entrant dans la salle, en ouvrant un livre ou en lançant un film sur son téléviseur).

 Il est d’ailleurs étonnant que certains champions de la geekitude encensent des films comme Jupiter Ascending pour sa synthèse d’influences mythologiques sans reconnaître que les super-héros le font depuis , et ce de manières inconscientes au départ, leurs débuts.
Le cinéma est l’enregistrement de la pensée, selon Godard. Et il y assez de films et de cinémas dans le monde pour partager les diverses pensées formant LE Cinéma. Mais que le débat passionne reste la preuve que le cinéma fait naître en nous des émotions si fortes qu’il nous faut les partager.











Bref, attaquons-nous maintenant au film en lui-même. Il fait suite à Days of futur past et se déroule donc dans une ligne du temps toute neuve.

En 3700 avant notre ère, un groupe de mutants mené par En Sabbah Nur tente de prolonger la vie de ce dernier en transférant son essence dans un nouveau corps. Mais puisqu'il se considère comme un Dieu et se comporte comme un tyran, un petit groupe de dissidents décide de tenter un déicide. En Sabbah Nur disparaît dans l'écroulement de sa pyramide, emportant avec elle une technologie qui semble tout sauf humaine…
1983. Cela fait 10 ans que Raven Darkholme alias Mystique a sauvé le président des USA de Magneto. Les jeunes mutants la considèrent comme une héroïne et un modèle à suivre. Pour se cacher en plein jour, Raven ne se balade plus sous sa forme bleue. Elle parcourt le monde pour sauver des mutants exploités par les humains. Charles Xavier a rouvert son école et accepté la perte de ses jambes et son rôle d’enseignant pacifiste. Quant à Magneto, il a rejoint le monde des humains en Pologne et vit comme ouvrier dans une usine de métallurgie. Il a une femme et une petite fille, Nina.
Erik semble enfin avoir trouvé la paix qui lui manquait tant. Un incident à l'usine révèle sa vraie nature et la police vient le chercher chez lui pour qu'il réponde de ses actes en tant que Magneto.
Au même moment, après un sommeil de 5000 ans, En Sabbah Nur s'éveille dans un monde qu'il ne connaît pas. Mais très vite, il apprend et une vérité dérangeante vient le troubler : le monde appartient aux faibles. Il décide de reprendre son action là où il l'avait laissée et se met en quête de disciples.


Le film est très riche : en thèmes, en actions, en questionnements. Et très fluide. Mais cette fluidité s’acquiert par le sacrifice de nombreux éléments en cours de routes et une trop grande rapidité dans la présentation des personnages et des situations de chacun (nouveaux personnages comme vieux de la vieille ).
C'est le principal reproche à faire à ce film : il manque à vue de nez 20 bonnes minutes coupées au montage. Et si l'histoire est fluide, le montage peut sembler un peu abrupte, il manque parfois quelques secondes à quelques plans pour laisser respirer non pas le spectateur mais le film lui-même pour qu'il paraisse moins artificiel.
Bryan Singer a-t-il de nouveau fait des concessions à la FOX pour sortir un film en salle et pouvoir sortir une version plus personnelle un an plus tard en blu-ray ? C'est envisageable.
Ce gros point noir n'empêche pas l'intrigue d'être comprise bien entendu mais elle rend peu évidente  les raisons qui unissent certains personnages si vite ( ainsi, toute une séquence voyant le jeune Scott Summers/Cyclope,Jean Grey et Diablo partir en vadrouille est sacrifiée en grande partie, ne reste que leur sortie d'une salle de ciné où ils se permettent un commentaire limite méta sur le cinéma et les trilogies, gros pied de nez à X-men The Last Stand ; Tornade n'a que quelques lignes de dialogues, Psylocke et Archangel aussi).
Certaines pistes narratives ne sont presque pas exploitées : la secte contemporaine qui vénère En Sabbah Nur n'apparaît plus dans le film une fois qu'elle a servi à introduire un certain élément alors qu'elle pouvait encore être utile une fois leur dieu de retour.

Le second gros défaut, c'est la pingrerie de la FOX : les effets spéciaux ne sont pas au top. Singer s'arrangent toujours pour les images soient belles même si elles sentent le chiqué mais voila : ça fait tiquer ! Aucun doute que ce défaut s'atténue au fil des visionnages mais en l'état, quand on découvre le film pour la première fois, ça fait un peu tâche.

Un petit défaut, qui ne fera qu'emmerder les fans de comics venus voir un comic book sur grand écran et pas un film tout court, ce sont les différences avec les comics (et le bordel chronologique de la saga que ce film n'arrange pas). 1° En Sabbah Nur se fait appeler Apocalypse dans les comics. Point de cela ici. Il garde son nom égyptien tout du long. Et alors que ses quatre cavaliers portent les noms de Guerre, Famine, Destruction et Mort, le film ne leur donne aucune autre fonction que celle de combattants zélés (notons que zélote est un mot qui provient de la même racine étymologique, coïncidence ? ).
Dans les comics, plusieurs personnes ont fait partie des 4 cavaliers, groupe qui a souvent renouvelé sa composition et pas uniquement avec des mutants : Apocalypse prône la survie du plus fort, mutant ou pas.



Et deux actrices pour Jubilee et Moira dont les âges ne collent pas avec la première trilogie (voire X-men 2 et 3), ça fait très tâche.















Pour le reste, ma foi...Singer en change pas sa recette esquissée avec X-men mais bien discernable depuis X-men 2 : une technique irréprochable, des morceaux de bravoure cinématographiques à faire pâlir n'importe quel réalisateur, une recherche du beau . Le tout enrobé dans un spectacle divertissant sans être abrutissant ou stupide. Encore une preuve que les deux sont conciliables et ne font pas fuir le public lors de leur union.
Qui se souvient de la scène d'intro d'X-Men 2 et de sa virtuosité technique ne pouvait qu'être excité à l'idée de voir ce qu'il ferait d'un mutant comme Quicksilver dont il avait teasé durant des semaines les phases de tournages de Days of future past. Quel dommage que, bien qu'encore une fois il hausse le niveau de jeu, Singer se contente de nous resservir Peter Maximoff en mode super-bolide sur fond de hit musical ( des années 80 cette fois-ci). Certes, la séquence en question défonce tout et reste un morceau de bravoure filmique comme peu arriverait à en faire mais il n'y a rien de neuf dans le principe. Pire, cette séquence en tout point jouissive et qui fait sourire s'insère dans une scène dramatique au possible. C'est le grand écart émotionnel et cela nuit un peu à la tension qui devrait se dégager de l'ensemble.

On regrettera que la recette Roland Emmerich en matière de film catastrophe ait été choisie pour illustrer la dévastation : ce sont toujours des bâtiments emblématiques qui y passent.

Puisque Singer a adhéré au concept des X-Men car il permettait la métaphore, il n'est pas surprenant que certaines images sont nimbées de symbolisme.










[SPOILER]
 Alors qu'Erik se rend sans résistance, sa fille panique d'être séparée de son père et sa mutation se dévoile : une sorte de pouvoir empathique avec les animaux. Laissant sa peur envahir des rapaces, Nina attaque la police...un agent riposte et tue Nina et sa mère. L'image parle d'elle-même : face à l'une des mutations les plus belles qui soit, l'homme tue son lien avec la nature. Dieu crée, l'homme détruit. Erik perd sa famille à nouveau. Magneto revient et, durant tout le métrage, le spectateur ne peut qu'être touché par Erik. Sa rage, aussi dévastatrice qu'elle soit, est compréhensible. Point de manichéisme avec ce personnage.

Idem avec l'apparition du Phénix. Symbole de vie et de renouveau.  Jean Grey déchaîne enfin le Phénix que Xavier tentait de garder sous contrôle dans la première trilogie : ce qui mènera à la mort de Jean et son retour sous forme de Dark Phoenix.  La femme est symbole de vie, le phénix aussi. En acceptant ce qu'elle est , Jean détruit En Sabbah Nur qui n'était que la mort.
« Tout est révélé » seront ses derniers mots. Double sens puisque Apocalypse signifie en réalité révélations ( Jean de Patmos, en écrivant ses révélations en grec, nomme bien entendu ses écrits du mot apocalypse. Par déformation sémantique, on en est venu à considérer que ce mot désignait la fin du monde)  et que Jean se révèle enfin, forte , confiante en soi et plus puissante que jamais. Si le grand antagoniste du film se prenait pour un dieu, Jean est peut-être bien partie pour devenir une vraie déesse.  Voilà pourquoi dans cette nouvelle ligne temporelle elle ne meurt pas : elle a accepté son pouvoir, Xavier ne l'a jamais « enchaînée » et aucun ressentiment n'a pu se forger. Et puisque le Phénix apparaît si tôt et si fort, on pourrait bien voir une certaine race alien débarquer dans la saga. Oui, fan de comics, je sais que tu frétilles comme un poisson hors de l'eau à cette idée. Calme toi, tu stresses les autres. Et change de sous-vêtements , ça a débordé !

[FIN DU SPOILER]




Les combats sont aussi très symboliques ;  Storm contre Cyclope : deux leaders tournés l'un contre l'autre, le bleu contre le rouge ( les couleurs dans le film sont gérées comme par Snyder et Del Toro dans le sens où tout est fait pour harmoniser l'image et ne pas en faire de la bouillie colorée de carnaval) , Beast contre Psylocke : la brutalité contre la finesse des arts martiaux, la bête contre la belle. Diablo contre Archangel ( dont rien ne dit qu'il s'agit de Warren Worthington d'ailleurs , son look étant un peu différent de par les ergots sur ses ailes. Si Wolverine n'est pas le seul à guérir vite, il va sans dire que d'autres mutants peuvent avoir les mêmes pouvoirs) : un gentil diable contre un ange exterminateur au service d'un dieu.






Un dieu incarné par Oscar Isaac, un acteur que le grand public a mis du temps à connaître ( ah ça quand on préfère aller voir Iron-Man 2 que le sublime Agora...j'ai vu les deux le même jour, vous voyez que c'est faisable.Bon, j'étais en vacances, mais même...).
Le maquillage et le costume, lourd, ne viennent pas diminuer l'aura et le talent de l'acteur qui se glisse dans la peau d'un méchant plus que badass aux motivations claires et peu enclin au dialogue avec ses adversaires. Singer a eu recours à des techniques d’enregistrement particulières pour capter sa voix et s'est amusé en post-prod pour que celle-ci deviennent caverneuse ou profonde quand le personnage en a besoin pour laisser transpirer sa personnalité et ses motivations.
Tye Sheridan incarne un Scott Summers bien différent de celui de James Marsden : si l'adulte était un gars responsable, Sheridan incarne un semi-rebelle qui n'apprécie pas tant que ça l'école.
Kodi Smit-McPhee ( Let Me in ) , singe le jeu de alan Cumming pour donner corps à Diablo/Nightcrawler : logique puisque le personnage n'est pas foncièremetn très différent de sa version adulte.
Quand à Sophie Turner en jeune Jean Grey, elle rentre dans les pompes de Famke Janssen sans soucis et apporte même plus de personnalité à son personnage.

Pour les habitués que sont James MacAvoy, Michael Fassbender et Nicholas Hoult, rien à dire qui n'a déja été dit lors des autres films. Seul Jennifer Lawrence semble moins s'impliquer et se la jouer mode automatique. Dommage quand on connaît le talent de la comédienne à qui l'on a encore offert une Mystique différente du précédent volet car son personnage a évolué et suivi une nouvelle voie.













X-Men Apocalypse est un film généreux, bourrés de qualités et ses quelques défauts iront en s'atténuant avec le temps (et une probable version longue : pleins de photos du tournage ne sont pas dans le film, même les bandes-annonces en contenaient : parfois des détails tous petits comme une manœuvre dans un combat mais voila, les preuves sont là ). Ses faiblesses en font peut-être un épisode moins abouti que le précédent mais absolument pas un mauvais film X-Men.
La scène post-générique parlera surtout aux fans mais les profanes y trouveront aussi leur compte puisqu'elle annonce des choses très excitantes.


Petit mot sur la frise ornant cet article : c'est un pur produit marketing de la FOX, Apocalypse a dormi 5000 ans et ne s'est pas réveillée entre temps. Sinon le monde serait bien différent. Mais bon...la FOX quoi...mais comme je la trouvais jolie.

Fond vert ou décors en dur ? Bryan Singer a fait son choix : le budget a sans doute été englouti dans des décors pharaoniques (oui oui, j'ai osé ), ce qui expliquerait des effets digitaux moins aboutis ? 


mardi 10 mai 2016

Guerre de sécession !

Depuis 2010 , et Iron-Man 2 , il n’y a plus une année où un film Marvel Studios ne sort sur les grands écrans du monde entier (et peut-être même de la galaxie ! Allez savoir ce qu'on capte là-haut ! ).
Souvent deux films par an, plus rarement un seul.
Le Studio s’est lancé dans le pari fou (tenté depuis peu par Warner Bros. avec le catalogue DC Comics) de construire au cinéma ce que l’éditeur fait depuis ses débuts : créer un univers partagé où les différents héros se croisent, s’allient…ou se déchirent.
C’est le dernier cas qui va nous intéresser ici avec le troisième film Captain America : Civil War !

Univers partagé oblige , ce troisième film Captain America est tout autant la suite directe des aventures du super-soldat après « The Winter Soldier » que la conséquence d’Avengers : Age of Ultron.
La nouvelle équipe d’Avengers, allez soyons fan-boys et appelons la New Avengers, remplace donc le SHIELD sur le terrain.
Cap et son équipe traque un ancien membre de HYDRA. Mais au cours de l’intervention, un incident fait une dizaine de morts : des officiels du Wakanda, un petit pays d’Afrique qui vivait relativement replié sur lui-même depuis des siècles.

Cet incident, additionné aux catastrophes gérées par les super-héros ces dernières années, pousse les autorités à rédiger et à faire signer les accords de Sokovie , pour réglementer les activités héroïques.
Là où Tony Stark (rongé par le remords) y voit un cadre approprié où chaque personne doit rendre des comptes pour ses actes, Steve Rogers perçoit cette main mise du gouvernement sur lui et son équipe comme , au mieux handicapante et au pire complètement tyrannique avec cet objectif à plus ou moins long terme de faire des Avengers une arme étatique. Essoufflés par les combats et les blessures personnelles, les héros entament un conflit qui pouvait se résoudre par le dialogue et qui devient une véritable guerre de famille quand une étincelle met le feu aux poudres : Bucky Barnes, le soldat de l’hiver, semble responsable d’un attentat, à Vienne. Pour Stark et ceux qui ont signé les accords, Barnes doit être arrêté immédiatement. Pour Cap , il faut enquêter : ses sentiments envers son ami brouillent-ils sont jugement ?


Un point sur lequel on ne pourra rien reprocher à Civil War : la densité de son intrigue et les questionnements légitimes qui devraient se poser dans un monde où les super-héros existent et se comportent comme une milice ne répondant à aucune autorité légale.
Cette intrigue, justement, se base de loin sur la mini-série Civil War , dont elle partage bien entendu beaucoup de points communs : l’incident malheureux, le contrôle des super-héros, etc… Mais là où les comics étaient fort manichéens avec un Stark limite fasciste et un Rogers droit dans ses bottes mais peu enclin au compromis (mais peut-on en faire face au totalitarisme ?), le film ne pose jamais l’un ou l’autre comme ayant forcément tort ou raison. Les deux visions se comprennent et il est difficile de faire un choix. Mais le faut-il vraiment , en tant que spectateur, choisir un camp ? Contrairement aux comics de base, jamais le film ne simplifie le propos pour faire adhérer le spectateur à une vision des choses : son cœur est là, c’est à un drame familiale qui se règle à coups de pouvoirs et de technologies de SF auquel nous assistons. C’est Kramer contre Kramer chez les héros.









L’intrigue, comme énoncé plus haut, est riche et dense. Peut-être trop. Le film est long  ( 2h27 quand même ) et son rythme est mal géré. Telle scène aurait dû être creusée, telle aurait du être raccourcie…les deux premiers tiers du film souffrent de cette balance déséquilibrée qui n’est pas aidée par une réalisation certes nerveuses mais jamais inventive et peu immersive lors de la scène pivot du film, le fameux combat sur la piste de l’aéroport que TOUTES les bandes-annonces ont sur-vendue au possible lors de la phase marketing.
Ce n’est pourtant pas faute d’avoir des atouts et des arguments plaisants : des combats peu monotones, des protagonistes dont on sent l’attachement entre eux mais dont les opinions divergent trop, en des temps de troubles, pour ne pas en arriver à devenir vindicatifs.
La valse entre équipiers aussi : c’est un combat , pas une danse , tout le monde ne reste pas sur le même partenaire.
Et parmi ces partenaires, Ant-Man et le nouveau Spider-Man ( le troisième en 14 ans, un record) se taille une belle part. Les deux personnages sont nouveaux dans cet univers mais partagent des points communs : un sens de l’humour et de la répartie, et une envie profonde de briller aux yeux de certains : Scott Lang veut impressionner Captain America et Peter Parker veut se montrer à la hauteur des attentes de Tony Stark quand bien même le discours de Parker sur les pouvoirs et les responsabilités est bien plus proche de la philosophie de Steve Rogers.
Sur le papier, cette séquence avait tout nous faire décrocher la mâchoire dans un grand WOW jouissif.

Mais ce morceau de presque bravoure est alourdi par une donnée capitale : le sens visuel des frères Russo est inexistant. Leur premier film Marvel, The Winter Soldier, était surtout un thriller d’action musclé dans un monde pseudo-réaliste. Seuls le SHIELD et ses héliporteurs étaient vraiment bigger than life et , noyés dans l’intrigue implacable, les petits gars de ILM s’inséraient très bien dans le jeu. Aucun personnage n’avait de capacités vraiment hors norme.
Mais tout change ici avec des héros capables de grimper sur les murs, voler, lancer des rafales, etc…Jamais, au grand jamais, l’image ne se met au service d’une représentation digne de l’iconodulisme. Il n’y a pas de recherches du beau plan, juste du plan efficace.


Et cette critique peut s’appliquer à tout le film tant, comme son aîné, le film mise sur l’efficacité au détriment de la recherche graphique. En résulte souvent un montage haché mis en place pour donner l’illusion du rythme  (et ça marche assez souvent , rassurez-vous) mais tellement impersonnel. Chez Marvel Studios, on veut des faiseurs habiles mais remplaçables au service de la tête pensante qu’est le producteur Kevin Feige, chez Warner on veut des réalisateurs avec une vision propre, quitte à devoir se prendre la tête sur la gestion des prochains films. Les deux méthodes ont des défauts et des qualités ( et il faudra encore quelques années avant de voir celles de Warner et surtout sa viabilité commerciale – et non pas artistique – face à la concurrence ).



Là où le scénario et l’équipe technique assurent sur tous les points, c’est la gestion des personnages et l’intrusion de nouveaux venus : Spider-Man n’arrive pas comme un cheveu sur la soupe contrairement aux effets spéciaux qui le font se mouvoir : eux sont trop voyants. Et la Panthère Noire débarque enfin.
Là aussi, ses mouvements générés par ordinateurs sont un peu voyants mais il a la chance d’être un personnage moins voltigeur que Spidey, ce qui le fait apparaître bien plus souvent en vrai ( que ça soit l’acteur Chadwick Boseman ou un cascadeur qui s’y colle). Ces deux héros sont présentés ou réintroduits dans le cas de Spider-Man pour être ensuite exploités dans des films à leurs noms.





Au final, Civil War est un film pétris de défauts de réalisations et au rythme qui a du mal à envelopper le spectateur pour ne le lâcher qu’à la fin : trop dense, trop ambitieux en termes de personnages à gérer sans en sacrifier ( LE coup casse-gueule par excellence quand on dépassé la dizaine) . Cela n’en fait pas pour autant un mauvais film tant l’écriture, les enjeux et les retournements de situation où l’on se fait avoir comme des bleus sont là et bien là.

Me reste à aborder un point sur l’univers Marvel au cinéma : depuis le début , il s’agit de mettre en place des éléments en vue du grand final : Avengers Infinity War part.II ( les deux films seront intégralement filmés en IMAX d’ailleurs ) . Petit à petit, on a posé un échiquier, on a placé les pièces, joué avec…maintenant, la partie se rapproche de son dénouement et la disposition des Rois, des fous et autres pions ne laissent plus vraiment de place pour les surprises ou les prises de risques ( si jamais il y en avait eues auparavant ). La partie se termine et n’importe qui ayant un cerveau plus ou moins capable de prendre du recul et de faire une vue d’ensemble peut aisément deviner des éléments vers lesquels les futurs films nous mènent. Car ces éléments découlent d’une logique pure et les ignorer seraient idiots. Alors oui, Marvel Studios aiment bien prendre son public pour plus bête qu’il n’est parfois ( Thor, Avengers, Iron-Man 2, Guardians of Galaxy) mais ils cherchent un semblant de cohérence entre les films depuis belle lurette. Je les imagine mal changer de cap


jeudi 5 mai 2016

Alien Woody.

Wetta comics est un petit éditeur indépendant français qui propose bien souvent des comics sous licences : Alien, Robocop,etc… En raison de son statut, l’éditeur ne publie pas des masses et des masses.
Annoncé et teasé depuis des mois par Wetta, Aliens Absolution ( alias Aliens Salvation en V.O) débarque dans nos contrées sous la forme de trois éditions différentes : une classique couleur, une collector à jaquette et une édition large en noir et blanc. Les tirages sont limités selon l’édition, attention il n’y en aura pas forcément pour tout le monde.

Illustration provenant du facebook de l'éditeur.

Aliens Salvation est une œuvre datant de 1993 dessinée par Mike Mignola (avant qu’il n’explose avec Hellboy ) et scénarisée par Dave Gibbons ( Watchmen…le dessinateur de Watchmen).  Dave Gibbons ayant scénarisé une rencontre bien fun entre Predator et Batman, le lecteur pourrait être tenté de se lancer dans l’aventure les yeux fermés (mais ça serait se priver du trait de Mignola).

La capsule de secours d’un cargo s’écrase sur une planète hostile. Deux rescapés. Le capitaine et un membre d’équipage très pieux. Mais dans l’ombre, une créature bien plus hostile que la faune locale rôde. Une créature mortelle au sang acide. Une créature qui pourrait bien être à l’origine du crash du vaisseau…

Voila ce qu’on appelle foirer son coup, dans les grandes largeurs.
Les personnages sont à peine esquissés psychologiquement : le dévot est très dévot, le capitaine est un va-t-en-guerre tyrannique et un brin psychopathe, les races autochtones sont peu inventives ( des ptérodactyles ou des ptéranodons – j’ai jamais su faire la différence – et des gorilles à peine plus gros que les gorilles terrestres ) et les aliens ne sont pas utilisés autrement que dans les films.
Tous les clichés de la série de films, qui fonctionnent car faisant partie de l’ADN de la saga, sont ici réutilisés sans vergogne dans ce qui se révèle être un shoot’em up auquel on ne peut pas jouer.



En l’état , le résultat scénaristique est une catastrophe industrielle ponctuée de bonnes idées et de bons rebondissements de situation. Mais peut-être que le format, très court, n’a pas permis de développer la chose comme il aurait fallu. Qu’un catholique convaincu pense en termes d’enfer et de démons face à la planète et aux xénomorphes n’est pas con mais tout cela reste à la surface, la folie ne guette pas, le potentiel n’est pas du tout exploité !





Les dessins de Mike Mignola sont par contre de toute beauté, la technique de l’homme est presque à maturité et n’attend que deux ans avant de faire le bonheur des rétines dans Hellboy. Mais ce qu’on lui demande de dessiner est tellement commun et convenu que les fans actuels risquent d’être déçus par le manque de folie de l’ensemble.  Néanmoins, son utilisation des zones d’ombres apporte une touche de suspens dont le scénario était totalement dépourvu.
Et c’est sous la forme « noir & blanc » que cela est le mieux retranscrit.
Aliens Absolution est donc une déception colossale que les dessins d’un Mignola en forme ne vient pas forcément sauver. Mais l’édition RAW (en noir et blanc ) , grâce à un grand format , est presque une livre d’art qui en jette dans une bibliothèque.