mardi 23 août 2016

L'étoile stellaire de la loi et l'ordre.

Le western et la SF, ça se marie bien. On ne compte plus les exemples : Star Wars, Firefly, Outland (pour la section « cinémaaaa »).

Copperhead, chez Urban Comics, est , vous l’aurez compris en lisant l’incipit, un western de science-fiction. Sur une planète désertique, le Shérif Clara Bronson débarque avec son fils pour reprendre le poste de son prédécesseur, décédé. Très vite, elle doit faire face aux clichés du genre : magnat industriel qui pense que le monde est à sa botte, adjoint acariâtre dont l’espèce a perdu la guerre contre les humains (une sorte de Chewbacca cynique et habillé) et…sa première enquête sera un bel homicide.
La ficelle est connue : commencer une série par un meurtre est une bonne manière de passer en revue l’univers de la-dite série ( ses personnages réguliers, les coutumes, etc…) et utiliser un tel procédé n’est pas honteux, la très bonne série « Fables » avait elle aussi débuté comme cela et on a bien vu/lu ce que ça donnait.

Mais Copperhead n’est pas Fables, œuvre littéraire érudite et jamais prétentieuse (cela dit en passsant).
Copperhead est un western classique dans un environnement de space opera. Comme le dit le scénariste Jae Farber dans son introduction, il écrit chaque épisode en gardant en tête qu’il s’agit d’un western, genre codifié à l’extrême dont le renouveau ne passe pas par une refonte de ses formules mais pas le talent des personnes attachées à l’histoire ( revoir le formidable True Grit des frères Coen pour s’en rendre compte : non seulement le film ne renie pas les codes, mais il s’agit qui plus est d’un remake ! ).

Farber livre une copie agréable mais jamais surprenante. Les clichés sont là jusque dans les vêtements de villes des habitants. Seules les tenues de travail et l’équipement viennent nous rappeler que nous sommes dans une galaxie lointaine, très lointaine…(ou juste un système solaire, le background est encore assez sommaire à ce niveau, sans doute pour laisser de la marge au scénariste). On se doute bien que l’enquête et les rebondissements sont là pour nous mener en bateau jusque la résolution finale qui n’a rien du génie d’un Se7en. Mais on se laisse prendre au jeu de la lecture car : c’est cliché mais pas con, le rythme et le suspens sont bien dosés et donnent envie de continuer à tourner les pages après chaque cliffhanger et enfin : il fait bon, c’est l’été, pas la peine de prendre un coup de chaleur sous le soleil parce le cerveau chauffe trop sous l’astre de nos jours. Inutile donc de se demander pourquoi un shérif est engagé alors qu'ils sont des élus locaux, à la base...





Le dynamisme est également assuré par les dessins (et le découpage des cases, détail toujours très important ) de Scott Godlewski. Son trait est fin et léger. Si il ne finira sans doute jamais dans une galerie d’art ou dans un art-book à sa gloire, force est de constater qu’il mène sa barque correctement et assure le boulot qu’on lui demande : être efficace dans l’exercice de la série B fun et plaisante. Dommage, car son style, proche d'un Sean Murphy du pauvre, aurait peut-être un potentiel plus élevé.





Enfin, puisqu’il s’agit du premier tome d’une série qui doit faire son trou, Urban propose ce livre au prix de 10€. Ne vous privez pas d’une petite lecture d’été pour ce prix-là.
Reste un détail : une fois la belle saison et les vacances « sans prise de tête » terminées, le second tome se lira-t-il aussi aisément ? Nous verrons en temps voulu !

mardi 16 août 2016

Huis - clos.

Michelle quitte son appartement précipitamment et roule toute la nuit. Malheureusement, un
chauffard la percute et sa voiture termine sa course dans un ravin. Elle se réveille sur un matelas, une attelle au genou et enchaînée au mur. Son «  geôlier » , Howard, lui affirme qu’il l’a récupérée dans l’épave du véhicule et qu’elle est maintenant enfermée dans un bunker de survie, une attaque de nature indéterminée ayant frappé le monde. L’autre homme habitant cet endroit enterré se nomme Emmet et confirme à Michelle l’histoire d’Howard. Ne croyant absolument pas ce qu’on lui raconte, Michelle décide de s’échapper…

10 Cloverfield Lane n’est pas à proprement parler une suite de Cloverfield, mais il en partage une partie de l’ADN selon son producteur J.J Abrams.
Il partage aussi une partie de son pitch avec l’histoire de bande-dessinée « Protège-moi (Shelter Me) » parue dans le magazine Métal Hurlant.
Mais le traitement sera tout autre.
Tourné dans le pus grand secret pour surprendre le public , 10 Cloverfiel Lane débarque donc presque à l’improviste dans une année cinéma assez molle. En grande partie pour nous secouer !

Le réalisateur Dan Trachtenberg signe ici son premier long-métrage après avoir réalisé quelques épisodes de séries télévisées ( comme le producteur J.J Abrams avant lui…ou encore un certain Steven Spielberg, grande influence de Abrams himself).
Trachtenberg ne révolutionne pas la façon de filmer mais jamais il ne lasse le spectateur malgré l’unité unique de lieu, un bunker sous terre à peine plus grand qu’un appartement moyen et un casting très réduit , 3 acteurs plus la voix de Bradley Cooper ( l'acteur ayant travaillé un moment avec J.J Abrams quand ce dernier se consacrait à sa série Alias).
Le montage est nerveux, énergique mais sans effet de style clipesque ou facile. Le scénario relance d’ailleurs la machine toutes les 10 minutes sur les 100 minutes que dure le film. Impossible de s’ennuyer : la tension, le suspense et un peu d’action font monter crescendo le stress du spectateur jusqu’au final qui , s’il ne lie pas le film à Cloverfield, a bel et bien un lien de sang avec le genre auquel le film de Matt Reeves appartenait.




Howard est incarné par la légende John Goodman. Cet immense acteur ( dans plusieurs sens du terme ) passe en quelques secondes d’un personnage flippant à une personne attentionnée mais dérangée. Le public ne sait sur quel pied danser avec lui, ce qui le force à rester en alerte durant toute la projection. Quand écriture et interprétation sont au diapason, le résultat est toujours brillant.
Mary Elizabeth Winstead incarne une Michelle volontaire et prête à tout pour se sortir de la gueule du loup. Son personnage, pourtant vite catalogué comme une lâche qui fuit au premier petit pépin va devoir trouver une nouvelle force en elle jusqu’à se transformer entièrement. Winstead se hisse alors sans soucis au niveau des Ellen Ripley et autres Sarah Connor. Tout le film se déroule de son point de vue, on ne la quitte jamais et on s’attache à elle autant que l’on s’interroge : aurait-on le cran que montre son personnage pour s’en sortir ?






Série B de luxe qui démontre, par son sens du rythme et sa réalisation faisant monter la tension minute par minute, que le temps est effectivement relatif (le film file à une vitesse folle ), 10 Cloverfield Lane est assurément un spectacle ébouriffant plus que conseillé.