Petite
avant-première littéraire aujourd’hui puisque nous allons revenir sur un
ouvrage qui ne sortira que le 10 Janvier 2013 en librairie sous la houlette des
éditions Denoël. Une sombre histoire de loup-garou, mais pas que ! Et
avouez qu’une histoire de loup-garou dans une collection qui s’appelle lunes d’encre,
c’est cocasse !
Les
monstres ont toujours eu la cote. Ils permettent l’effroi facile et nous font
oublier que les véritables monstres qui nous hantent ne sont guères différents
de vous et de moi. La littérature et le
cinéma ont depuis toujours joué avec eux sans pour autant les laisser occuper trop d'espace.
Mais , et c’est
bien la seule chose dont on pourra lui tenir grâce, une auteure américaine peu
inspirée a remis le monstre en avant. Merci Stephenie Meyer, ta tétralogie
aussi vide que le cerveau de Kim Kardashian a eu le mérite de relancé le
vampire sur le devant de la scène. Les éditeurs se sont engouffrés dans la
brèche de ce succès, donnant le feu vert à divers projets vampiriques et ce
même s’ils étaient bien loin de mettre en avant des créatures qui tenaient plus
de la sangsue humaine que du vampire. Du coup, le vampire a déferlé et a occupé
l’espace.
Pour tenter
de contrebalancer l’hégémonie vampirique, c’est le Zombie qui est vite venu
chatouiller les lecteurs. Lui aussi a mangé une bonne part du gâteau. Mais
aujourd’hui, c’est le dernier monstre emblématique qui débarque. Le loup-garou.
Un être qui, finalement, n’a jamais vraiment eu les honneurs d’une mise en
avant aussi forte que celle de ses cousins avides de tuer de l’humain.
Jake
Marlowe est le dernier loup-garou. C’est officiel, son frère de race berlinois
s’est fait descendre par les membres de l’OMPPO. Jake est donc la dernière
cible.Et cela ne le perturbe pas trop, car avec presque 201 ans au compteur
(dont 167 en tant que lycanthrope) , Jake est blasé. Il a tout vu, tout lu,
tout fait. Tellement las qu’il en est à la limite du suicidaire. Cela ne plait
ni aux chasseurs chargés de sa mise à mort ( quel amusement à tuer un être qui n’offre
aucun challenge? ) , ni à la mystérieuse Jacqueline Delon, férue d’occultisme
qui semble bien vouloir protéger le dernier spécimen vivant de lycanthrope. On
ne peut plus,de nos jours, mourir de la façon dont ou voudrait ma petite dame !
Mais la vie
est pleine de surprises ! Et quand les surprises en questions sont de
nature vampirique et sentimentale, tout se complique encore plus. Mais la
complication réveille parfois l’envie de vivre. Car à quoi bon suivre un
suicidaire durant 400 pages ?
Glen Duncan
( à ne pas confondre avec Hal Duncan ) a décidé de fournir ici une sorte d’anti-twilight :
narration à la première personne du personnage principal masculin (et quelle
narration : la structure des phrases, leur richesse et leur agencement
tiennent vraiment du travail littéraire dans ce qu’il a de plus poussé sans
être barbant) , gore, sexe crû ,des garous qui ne ressemblent pas à des gros toutous ,etc…Il a pris les ingrédients de la bit-lit
pour en faire tout autre chose et y insérer des effets tout sauf lisses donc.
Jake
raconte sa vie, sa morale, comment il a depuis longtemps endormi cette dernière
dans certains aspects de son existence. Tour à tour plus odieux que Dr.House,
charmeur,cynique,manipulateur ou romantique, Jake est un personnage fascinant car
terriblement humain dans sa complexité et ses contradictions. Grand amateur de
films, il n’hésite jamais à faire un parallèle avec l’une ou l’autre œuvre cinématographique
( ce qui, pour le cinéphile que je suis, représente plusieurs cerises sur le gâteau
).Le procédé qui consiste à lire les mémoires sur carnets ,que le monstre a laissé derrière lui ,rappelle le très bon Agyar de Steven Brust (Folio SF).
Le rythme, haletant,
n’empêche pas quelques moments plus calmes, plus introspectifs. Après tout,tout
comme Connor McLeod (Highlander), Jake se remémore ses débuts, les évènements
importants du siècle, son acceptation de la malédiction. Malédiction qui le
pousse à dévorer un humain par mois. L’auteur , sur le folklore connu ( pleine
lune, balle en argent), greffe des éléments intéressants comme cette envie de
manger mais aussi les répercussions sur la libido de ces êtres poilus ( le
loup-garou est un chaud lapin) en ne nous épargnant que peu de détails salaces.
Les vampires, bien que peu présents, sont également légèrement revisités (mais je n’en dirai pas plus, lisez le livre !!!) et leur antagonisme avec les loups est lui aussi traité avec quelques nouveautés ( nous ne sommes pas dans la saga Underworld ).
Sous
couvert d’un titre limite nanardesque et d’ingrédients connus et reconnus, Le
dernier loup-garou est LE roman le plus intéressant sur cet être paru depuis
longtemps (même celui écrit par Stephen King était peu convaincant). Un coup de cœur absolu !